{"id":218,"date":"2014-12-30T20:32:27","date_gmt":"2014-12-30T19:32:27","guid":{"rendered":"http:\/\/www.archipress.org\/wp\/?page_id=218"},"modified":"2015-01-17T13:02:00","modified_gmt":"2015-01-17T12:02:00","slug":"218-2","status":"publish","type":"page","link":"https:\/\/www.archipress.org\/?page_id=218","title":{"rendered":"Nanot robot"},"content":{"rendered":"

Et le nanot robot cr\u00e9a le monde en 6 minutes…<\/h3>\n
… ce qui nous permit de nous reposer le reste de l’ann\u00e9e. C’est vrai, \u00e0 la fin! Scier, coller, souder, fondre, mouler, polir … au diable ces vieilleries! Puisque les scientifiques nous pr\u00e9disent l’ouvrier de r\u00eave, invisible \u00e0 l’oeil nu, construit mol\u00e9cule apr\u00e8s mol\u00e9cule.<\/strong><\/div>\n

Nicolas Henchoz est journaliste scientifique au \u00ab\u00a0Journal de Gen\u00e8ve et Gazette de Lausanne\u00a0\u00bb, \u00e0 Gen\u00e8ve. Ing\u00e9nieur EPFL, il est \u00e9galement dipl\u00f4m\u00e9 en science des mat\u00e9riaux. Peut-on r\u00eaver meilleure formation pour vulgariser l’univers si complexe des technologies nouvelles ou \u00e0 venir? \u00ab\u00a0Tr\u00e8s chers et fid\u00e8les coll\u00e8gues,<\/p>\n

Vous qui m’avez suivi tout au long de ces fascinantes d\u00e9cennies, vous qui avez eu foi en mon message \u00e0 l’\u00e9poque o\u00f9 l’on se gaussait de moi, je vous ai r\u00e9unis ici pour c\u00e9l\u00e9brer une perc\u00e9e technologique d\u00e9cisive. Nous avons en effet v\u00e9cu un bouleversement aussi puissant que l’av\u00e8nement simultan\u00e9 de la r\u00e9volution industrielle, des antibiotiques, de l’\u00e9nergie atomique et de l’outil informatique. Je fais \u00e9videmment allusion \u00e0 la nanotechnologie. Souvenez-vous! Il y a si longtemps, j’avais \u00e9t\u00e9 le premier et le seul \u00e0 m’enthousiasmer pour cette nouvelle technologie et \u00e0 pr\u00e9dire ses possibilit\u00e9s.<\/p>\n

Je suis bien \u00e2g\u00e9. Mais je me souviens fort bien des techniques de production utilis\u00e9es \u00e0 la fin du vingti\u00e8me si\u00e8cle. Elles ne constituent plus aujourd’hui, fort heureusement, qu’un \u00e9prouvant cauchemar enfoui au plus profond de nos biblioth\u00e8ques informatiques de poche. Les chercheurs et les industriels d\u00e9veloppaient certes des proc\u00e9d\u00e9s automatiques mais encore tellement barbares: d\u00e9coupage, soudage, r\u00e9actions chimiques massives, bref des manipulations grossi\u00e8res, violentes et qui g\u00e9n\u00e9raient d’incroyables quantit\u00e9s de d\u00e9chets et de r\u00e9sidus. La consommation d’\u00e9nergie fossile et de mati\u00e8res premi\u00e8res suivait une inqui\u00e9tante courbe ascendante. Et je ne mentionne que pour m\u00e9moire les objets afflig\u00e9s de d\u00e9faut de construction qu’il fallait jeter ou qui ne r\u00e9sistaient que peu de temps \u00e0 l’usage. Quel gaspillage! Quelle entreprise de destruction!<\/p>\n

Depuis, la r\u00e9volution industrielle de l’assemblage mol\u00e9culaire a touch\u00e9 tous les domaines: l’informatique, la m\u00e9decine, la production d’\u00e9nergie, les moyens de transports et j’en passe. L’id\u00e9e en \u00e9tait simple mais il a fallu beaucoup de temps pour la concr\u00e9tiser. Je vous la rappelle bri\u00e8vement: et si, au lieu de d\u00e9truire pour produire, on construisait les objets \u00e0 partir de l’unit\u00e9 la plus \u00e9l\u00e9mentaire constituant tout mat\u00e9riau, l’atome? Autrement dit, il suffisait de mettre au point les robots capables d’installer un \u00e0 un chaque atome – ou du moins chaque mol\u00e9cule – \u00e0 la bonne place. Cette technique de fabrication, \u00e0 l’\u00e9chelle du nanom\u00e8tre (millioni\u00e8me de millim\u00e8tre), porte un nom que vous connaissez bien aujourd’hui: la nanofabrication.<\/p>\n

Un calcul relativement simple en r\u00e9sume bien le principe. Prenons un diamant d’un carat. Il contient dix milliards de trillions d’atomes. Un robot tr\u00e8s rapide, capable par exemple de manipuler dix millions d’atomes par seconde, mettrait trente-deux millions d’ann\u00e9es pour construire un tel diamant. Bien trop long pour un usage industriel! Mais il y a moyen d’obtenir un r\u00e9sultat convaincant. Il suffit que le robot puisse se dupliquer tout seul, mol\u00e9cule par mol\u00e9cule. En admettant qu’il le fasse en une quinzaine de minutes et que chaque nouveau robot reproduise le processus, nous avons, au bout de quatorze heures, un million de milliards de robots. Ensemble, ils peuvent alors construire le diamant en dix secondes! Tout simplement en prenant chaque atome de carbone \u00e0 leur disposition et en le d\u00e9posant \u00e0 la place ad\u00e9quate. Un tel proc\u00e9d\u00e9 de fabrication par construction – et non par destruction – \u00e9limine la presque totalit\u00e9 des pertes et des d\u00e9fauts.\u00a0\u00bb<\/p>\n

Clic, r\u00e9veil, fondu-encha\u00een\u00e9 sur le dormeur en train de s’extirper de son discours juste avant que n’\u00e9clatent les applaudissements tant attendus. Et m\u00e9rit\u00e9s? Nombre de scientifiques rangent l’Am\u00e9ricain Eric Drexler dans la cat\u00e9gorie des pseudo-savants plus attir\u00e9s par la fumisterie, la science-fiction et le discours th\u00e9orique que par la concr\u00e9tisation de ses intuitions. A 39 ans, Eric Drexler vient de d\u00e9crocher un doctorat en nanotechnologie mol\u00e9culaire au c\u00e9l\u00e8bre MIT (Massachusetts Institute of Technology), entre autre pour river leur clou \u00e0 ses d\u00e9tracteurs. Mais cela fait bien quinze ans d\u00e9j\u00e0 qu’il bat la campagne en faveur de sa discipline pr\u00e9f\u00e9r\u00e9e. Et qu’il publie ouvrage sur ouvrage, article apr\u00e8s article, organisant des s\u00e9minaires, des rencontres, des conf\u00e9rences, discourant, discutant \u00e0 en perdre haleine. En 1986, il a m\u00eame fond\u00e9 leForesight Institute, \u00e0 Palo Alto (Californie), regroupant aujourd’hui quelque mille membres. Ce centre de nanotechnologie rassemble toute la documentation imaginable sur le sujet, la met \u00e0 disposition de ses membres et, contre paiement, procure du mat\u00e9riel d’information aux non membres.<\/p>\n

En outre, Eric Drexler m\u00e8ne quelques activit\u00e9s de recherche au MIT. Mais la communaut\u00e9 scientifique continue \u00e0 faire la moue devant ce grand communicateur m\u00e9diatique. Tout en lui reconnaissant au moins le m\u00e9rite de faire progresser la cause de la nanotechnologie par l’immense battage qu’il entretient aupr\u00e8s du public et des d\u00e9cideurs. C’est donc \u00e0 lui qu’un bienfaiteur anonyme a vers\u00e9, il y a deux ans, la somme de 175’000 dollars qui a servi \u00e0 la cr\u00e9ation d’une fondation, l’Institute for Molecular Manufacturing (IMM). But de la fondation: trouver les sommes n\u00e9cessaires pour sponsoriser l’avancement de la nanotechnologie et de la production mol\u00e9culaire.<\/p>\n

L’ap\u00f4tre de la nanotechnologie – titre un peu perfide d\u00e9cern\u00e9 par la revue \u00ab\u00a0Science\u00a0\u00bb – n’est pas na\u00eff au point de ne pas reconna\u00eetre les pi\u00e8ges de la pr\u00e9diction scientifique. Il veille donc \u00e0 respecter les principes pos\u00e9s par Steven Schnaars (dans \u00ab\u00a0Megamistakes: Forecasting and the Myth of Rapid Technological Change\u00a0\u00bb) pour \u00e9viter les erreurs en proph\u00e9ties. Voulez-vous la recette de la pr\u00e9vision technique parfaitement fausse et fumeuse? Alors, 1) ignorez les faits scientifiques; 2) oubliez de vous demander si quelqu’un d\u00e9sire le produit imagin\u00e9 (en termes classiquement \u00e9conomiques: s’il y a une demande pour ce produit); 3) ignorez l’importante question des co\u00fbts; 4) tentez de pr\u00e9dire quelle firme ou quelle technique va l’emporter. Ce faisant, vous vous ridiculiserez aussi s\u00fbr que deux et deux font quatre. Tr\u00e8s peu pour Eric Drexler.<\/p>\n

Dans son livre le plus r\u00e9cent, intitul\u00e9 \u00ab\u00a0Unbounding the Future: the Nanotechnology Revolution\u00a0\u00bb, il diss\u00e8que donc la question des co\u00fbts. D’apr\u00e8s lui, la nanofabrication permettra de mettre sur le march\u00e9 non seulement des objets \u00e0 peine imaginables aujourd’hui et parfaitement respectueux de l’environnement; mais ces objets seront, en plus, extr\u00eamement bon march\u00e9. Tr\u00e8s sch\u00e9matiquement d\u00e9crites, les raisons pourraient en \u00eatre les suivantes:<\/p>\n

Premi\u00e8rement, \u00e9conomie sur les mati\u00e8res premi\u00e8res. La production mol\u00e9culaire (ou nanofabrication) n’exige aucun composant rare (donc cher). Elle se contente de d\u00e9riv\u00e9s du p\u00e9trole et de la biomasse: gaz, m\u00e9thane, ammoniaque, hydrog\u00e8ne. Quelques dizaines de centimes par kilogramme au prix des ann\u00e9es 90. Dans l’usine, les robots assembleront directement ces substances de base pour, si c’est n\u00e9cessaire, constituer des mati\u00e8res particuli\u00e8res.<\/p>\n

Deuxi\u00e8mement, \u00e9conomie sur l’\u00e9limination des d\u00e9chets. La masse des r\u00e9sidus diminue en effet drastiquement, ce qui entra\u00eene une chute consid\u00e9rable de la consommation de mati\u00e8res premi\u00e8res (renforce le premier effet). Les quelques d\u00e9chets in\u00e9vitables sont recycl\u00e9s dans le processus de fabrication ou transform\u00e9s en substances pures utilisables dans d’autres productions.<\/p>\n

Troisi\u00e8mement, \u00e9conomie de main-d’oeuvre. L’automation devient quasiment totale puisque, beaucoup trop petits, les processus de production n’autorisent plus l’intervention humaine. L’usine ne fonctionne donc plus qu’avec de rares surveillants.<\/p>\n

Quatri\u00e8mement, \u00e9conomie sur les primes d’assurances. Par la r\u00e9duction sensible du personnel et l’\u00e9limination presque totale des d\u00e9fauts de fabrication. Ce dernier stade \u00e9tant acquis parce que les robots producteurs sont intelligents: ils sont pourvus de senseurs et de syst\u00e8mes d’alerte.<\/p>\n

Toutefois, il faut nuancer les effets de cette liste d’arguments sur les prix. Le progr\u00e8s technologique engendre en effet m\u00e9fiance et incertitude, deux puissants freins \u00e0 son adoption g\u00e9n\u00e9ralis\u00e9e, deux barri\u00e8res tenaces aux avantages \u00e9conomiques que l’on peut en retirer. Reste aussi que les investissements n\u00e9cessaires pour mettre la nanotechnologie au point seront substantiellement \u00e9lev\u00e9s et qu’il est difficile de pr\u00e9voir certains autres co\u00fbts (frais de conception, de design, administratifs, juridiques, etc.). D’autant que l’\u00e9volution des mentalit\u00e9s joue, l\u00e0, un r\u00f4le pr\u00e9pond\u00e9rant.<\/p>\n

Pour en revenir aux aspects positifs, il faut remarquer que les \u00e9valuations pr\u00e9c\u00e9dentes se basent sur un prix constant de l’\u00e9nergie et des mati\u00e8res premi\u00e8res. Toutefois, d’apr\u00e8s Eric Drexler, la nanotechnologie entra\u00eene in\u00e9vitablement une spirale de baisse des prix. Exemple: la nanofabrication d’un kilogramme de peinture contenant des cellules solaires (photovolta\u00efques) nanoscopiques co\u00fbte un dollar de mati\u00e8re premi\u00e8re et quatre dollars d’\u00e9nergie. Supposons que les autres co\u00fbts s’av\u00e8rent n\u00e9gligeables. On peut alors recouvrir les routes avec une couche de peinture \u00e9paisse de quelques milli\u00e8mes de millim\u00e8tre au prix d’une dizaine de centimes par m\u00e8tre carr\u00e9. Chaque m\u00e8tre carr\u00e9 peut transformer suffisamment d’\u00e9nergie solaire en \u00e9lectricit\u00e9 pour fabriquer un autre m\u00e8tre carr\u00e9 de peinture en moins d’une semaine. La production d’\u00e9nergie augmente ainsi rapidement, engendrant une forte diminution de son prix.<\/p>\n

L’abondance \u00e9nerg\u00e9tique permet alors d’exploiter de nouvelles ressources de mati\u00e8res premi\u00e8res. Il devient \u00e9conomiquement possible d’extraire du carbone, \u00e9l\u00e9ment de base des produits nanofabriqu\u00e9s, directement de l’atmosph\u00e8re. Dont tout le monde sait qu’elle contient justement un exc\u00e9dent de gaz carbonique. A son tour, la r\u00e9duction du prix de la mati\u00e8re premi\u00e8re engendre une baisse du co\u00fbt des nanoproduits, etc. \u00ab\u00a0On peut difficilement estimer jusqu’o\u00f9 peut aller cette spirale mais elle peut aller loin\u00a0\u00bb, conclut Eric Drexler. Qui ajoute encore: \u00ab\u00a0La fabrication mol\u00e9culaire r\u00e9alisera pour le travail des mat\u00e9riaux ce que l’informatique a fait pour le traitement de l’information.\u00a0\u00bb<\/p>\n

Et venons-en aux racines concr\u00e8tement scientifiques qui fondent les espoirs d’Eric Drexler. De nombreuses recherches tendent vers la nanotechnologie, vers la miniaturisation ultime. Celle d’un David Blair, de l’Universit\u00e9 d’Utah aux \u00c9tats-Unis, en biologie mol\u00e9culaire par exemple. Ce chercheur \u00e9tudie les bact\u00e9ries qui se propulsent au moyen d’un flagelle (filament faisant office d’h\u00e9lice). Les bestioles poss\u00e8dent un moteur mol\u00e9culaire de 25 nanom\u00e8tres (25 millioni\u00e8mes de millim\u00e8tre) qui fait tourner le flagelle \u00e0 18’000 tours\/minute. Moyennant quoi, une bact\u00e9rie de taille moyenne se d\u00e9place de 30’000 nanom\u00e8tres par seconde. Pour l’instant, David Blair n’a pas r\u00e9ussi \u00e0 d\u00e9cortiquer la totalit\u00e9 des processus motoris\u00e9s mais a mis \u00e0 jour le syst\u00e8me d’injection du carburant (il s’agit d’un canal \u00e0 protons).<\/p>\n

En ce moment, au nombre des voies qui tendent vers la nanotechnologie, les microscopes \u00e0 sonde locale d\u00e9tiennent incontestablement la vedette. Ils ont permis aux chercheurs de visualiser des atomes isol\u00e9s et m\u00eame d’en d\u00e9placer. Ils sont, l\u00e0, droit dans le sujet.<\/p>\n

Ces instruments sont devenus m\u00e9diatiquement c\u00e9l\u00e8bres lorsque leurs \u00ab\u00a0p\u00e8res\u00a0\u00bb, Heinrich Rohrer et Gerd Binnig, du laboratoire de recherche IBM de R\u00fcschlikon pr\u00e8s de Zurich, furent r\u00e9compens\u00e9s du prix Nobel (1986). Le principe th\u00e9orique qui les r\u00e9git – l’effet tunnel – date pourtant des ann\u00e9es trente. Bri\u00e8vement r\u00e9sum\u00e9, l’effet tunnel tourne autour du fait qu’un mat\u00e9riau ne l\u00e2che pas ses \u00e9lectrons car ils sont solidement retenus par les atomes. La surface du mat\u00e9riau officie comme une barri\u00e8re \u00e9lectrique. Si l’on approche une tr\u00e8s fine pointe (qui fait office de microscope en l’occurrence) \u00e0 moins de quelques nanom\u00e8tres de la surface du mat\u00e9riau, quelques \u00e9lectrons ont pourtant une mince chance de passer la barri\u00e8re et de se diriger vers la pointe. En appliquant une tension \u00e9lectrique de quelques volts entre la pointe et la surface, on augmente le nombre d’\u00e9lectrons fugitifs. Il se cr\u00e9e alors un courant \u00e9lectrique qui varie tr\u00e8s sensiblement en fonction de la distance qui s\u00e9pare la pointe du microscope de la surface du mat\u00e9riau. De cette mani\u00e8re, le microscope fournit une repr\u00e9sentation topographique de la surface explor\u00e9e avec une r\u00e9solution de l’ordre d’un atome (les accidents topographiques de la taille d’un atome deviennent d\u00e9tectables).<\/p>\n

Dans la foul\u00e9e, les scientifiques ont mis au point un microscope \u00e0 force atomique qui d\u00e9tient l’avantage sur le microscope \u00e0 effet tunnel de pouvoir observer les mat\u00e9riaux non conducteurs d’\u00e9lectricit\u00e9, y compris les \u00e9chantillons biologiques.<\/p>\n

Combin\u00e9s, les deux microscopes – \u00e0 effet tunnel et \u00e0 force atomique – deviennent microscope \u00e0 sonde locale, l’actuel dernier cri de cette technologie. Avec lui, une \u00e9quipe am\u00e9ricaine (Donald Eigler du laboratoire IBM \u00e0 San Jos\u00e9 en Californie) et un team japonais (Masaku Aono de l’Institut de recherche de physique et de chimie de Tokyo) ont r\u00e9ussi \u00e0 manipuler des atomes isol\u00e9s. Ils ont \u00e9crit le nom de leur soci\u00e9t\u00e9 et cr\u00e9\u00e9 des petites – vraiment petites! – figurines constitu\u00e9es de quelques dizaines d’atomes de x\u00e9non.<\/p>\n

Mais nous sommes encore loin des r\u00eaves d’Eric Drexler. D’autres chercheurs tentent, par exemple, de transporter du monoxyde de carbone vers des atomes d’oxyg\u00e8ne en vue de cr\u00e9er une mol\u00e9cule de dioxyde de carbone (CO2). Sans succ\u00e8s pour l’instant. En fait, le monde scientifique n’en est pas encore \u00e0 construire des objets, atome apr\u00e8s atome. Il tente d’abord – logique et n\u00e9cessaire – de d\u00e9couvrir et comprendre les principes physiques si particuliers qui r\u00e9gissent l’univers de la miniaturisation ultime.<\/p>\n

Mais les perspectives sont bel et bien l\u00e0. Et le Japon semble investir massivement en direction de la nanotechnologie. Difficile d’articuler un chiffre pr\u00e9cis car les sources de financement sont diverses et, surtout, on s\u00e9pare peu, sur le terrain, la nanotechnologie de la microtechnologie et de la recherche sur les semi-conducteurs. Tout cela appartient au monde de l’archi-petit. Pour le b\u00e9otien du moins. Car le scientifique sait bien, lui, que la nanotechnologie rel\u00e8ve du millioni\u00e8me de millim\u00e8tre tandis que la microtechnologie rel\u00e8ve du milli\u00e8me de millim\u00e8tre. Entre un nanomoteur (25 nanom\u00e8tres ou 25 millioni\u00e8mes de millim\u00e8tres), qu’ils ne savent pas encore construire mais qu’ils ont d\u00e9cel\u00e9 chez certaines bact\u00e9ries, et un micromoteur (50 milli\u00e8mes de millim\u00e8tre de diam\u00e8tre) qu’ils savent construire et int\u00e9grer dans les puces \u00e9lectroniques, il y a la m\u00eame diff\u00e9rence de taille qu’entre un moteur de montre et le diesel marin propulsant le paquebot Queen Elizabeth. Mais ces m\u00eames scientifiques m\u00e9langent parfois volontairement les termes. Que voulez-vous? Servie \u00e0 toutes les sauces, l’appellation microtechnologie ne fait plus assez high tech et n’en jette plus suffisamment. Tandis que nanotech, excusez du peu!<\/p>\n

Quoi qu’il en soit, il semblerait que le MITI (Minist\u00e8re japonais du commerce ext\u00e9rieur et de l’industrie) injectera quelque 150 millions de dollars en nanotechnologie ces dix prochaines ann\u00e9es. Dans des projets qui ont noms \u00ab\u00a0Yoshida Nanomechanism Project\u00a0\u00bb, \u00ab\u00a0Hotani Molecular Dynamic Assembly Project\u00a0\u00bb et \u00ab\u00a0Nagayama Protein Array Project\u00a0\u00bb (utilisations de prot\u00e9ines pour cr\u00e9er de nouveaux dispositifs mol\u00e9culaires) ou encore \u00ab\u00a0Aono Atomcraft Project\u00a0\u00bb pour la manipulation des atomes via microscopes \u00e0 sonde locale.<\/p>\n

Dans l’h\u00e9misph\u00e8re occidental, l’OTAN nourrit, elle aussi, quelques projets en nanotechnologie car – le saviez-vous? – cette organisation militaire poss\u00e8de une dimension scientifique. Quant \u00e0 la Suisse, elle a son temple de la nanotechnologie: le laboratoire de recherche IBM de R\u00fcschlikon \u00e9videmment, chez les p\u00e8res du microscope \u00e0 effet tunnel. Prix Nobel oblige. Mais la plupart des universit\u00e9s du pays abritent maintenant au moins un groupe de recherche \u00e8s nanotechnologie. L’institut f\u00e9d\u00e9ral Paul Scherrer d\u00e9finit actuellement un projet de recherche destin\u00e9 \u00e0 accro\u00eetre consid\u00e9rablement sa comp\u00e9tence en ce domaine. A l’\u00c9cole polytechnique f\u00e9d\u00e9rale de Zurich, le professeur J\u00fcrg Duval recrute une \u00e9quipe en vue de se lancer dans le nanorobot.<\/p>\n

Entre-temps, les ma\u00eetres de la disciplines que sont Iotaro Hatamura et Hiroshi Morishita de l’Universit\u00e9 de Tokyo ont franchi une \u00e9tape suppl\u00e9mentaire. Ils ont invent\u00e9 un appareillage qui fait mieux que simplement \u00ab\u00a0voir\u00a0\u00bb \u00e0 l’\u00e9chelle du nanom\u00e8tre. Leur \u00ab\u00a0nanomanipulateur\u00a0\u00bb permet \u00e0 l’\u00eatre humain, comme son nom l’indique, d’intervenir \u00e0 cette \u00e9chelle avec sa propre sensibilit\u00e9. Le chercheur peut ainsi \u00ab\u00a0voir\u00a0\u00bb la pi\u00e8ce nanoscopique, la tenir d’une main et travailler dessus avec l’autre main.<\/p>\n

Pour ce faire, un double \u00e9cran vid\u00e9o donne au manipulateur une vision st\u00e9r\u00e9oscopique (tridimensionnelle) de la pi\u00e8ce en travail. Deux joysticks (leviers) permettent l’un de d\u00e9placer et d’incliner la table o\u00f9 la pi\u00e8ce est fix\u00e9e, l’autre de manipuler un bras robot pourvu d’un outil. L’ensemble joystick-bras robot est con\u00e7u de telle mani\u00e8re qu’un d\u00e9placement du joystick de 10 centim\u00e8tres (grandeur ma\u00eetrisable pour une main humaine) correspond \u00e0 un d\u00e9placement de l’outil de dix milli\u00e8mes de millim\u00e8tre. Ce qui permet \u00e0 la main du chercheur de travailler sur une pi\u00e8ce dont il ne peut ma\u00eetriser la dimension en direct. De plus, des capteurs de force situ\u00e9s sur l’outil modifient la r\u00e9sistance des joysticks aux mouvements impos\u00e9s par l’utilisateur. Ce dernier a d\u00e8s lors r\u00e9ellement l’impression de toucher l’objet en travail.<\/p>\n

La mise au point du nanomanipulateur a un but: obtenir \u00e0 terme un outil de production extr\u00eamement pr\u00e9cis aux \u00e9chelles de l’ultraminiaturisation et satisfaire ainsi des demandes pressantes et croissantes \u00e9manant de la biotechnologie, de la m\u00e9decine et de l’industrie des semi-conducteurs.<\/p>\n

Nous voyageons donc bien sur la route qui m\u00e8ne \u00e0 la r\u00e9volution industrielle pr\u00e9dite par Eric Drexler. Mais nous sommes encore infiniment loin du but. Car, malgr\u00e9 leur nom, les nanomanipulateurs ne parviennent pas \u00e0 d\u00e9placer les atomes un par un pour construire des objets nanoscopiques. Si la pr\u00e9cision de leurs gestes rel\u00e8ve de la nanom\u00e9trie, les produits qu’ils ex\u00e9cutent ne rel\u00e8vent que de la microm\u00e9trie (souvenez-vous: la diff\u00e9rence entre un moteur de montre et celui du Queen Elizabeth!). Ils repr\u00e9sentent donc la suite logique de la tendance \u00e0 la miniaturisation que l’on observe depuis longtemps mais n’ont pas encore bascul\u00e9 dans le nouveau monde de la miniaturisation ultime.<\/p>\n

\u00a9 Le Temps strat\u00e9gique, No 51, Gen\u00e8ve, mai-juin 1998.<\/div>\n
ADDENDA
\n<\/strong>
\nEntre micros et nanos\u00a0<\/strong><\/div>\n
<\/div>\n
Microtechnologie, nanotechnologie, mais o\u00f9 donc se situe exactement la grandeur fronti\u00e8re au-dessous de laquelle on appartient au monde nano et au-dessus de laquelle on fait l’\u00e9l\u00e9phant dans le monde micro? Conventionnellement, les scientifiques l’ont fix\u00e9e \u00e0 100 nanom\u00e8tres, soit \u00e0 100 millioni\u00e8mes de millim\u00e8tres. Pourquoi pas? Il y bien un endroit o\u00f9, conventionnellement, les g\u00e9ographes nous font quitter l’Europe et nous disent que nous p\u00e9n\u00e9trons en Asie. Mais essayez de d\u00e9celer l’Oural qui d\u00e9termine la cote 100 nanom\u00e8tres. Sans microscope \u00e0 sonde locale, on vous souhaite bien du plaisir.<\/div>\n

\u00a0Les microscopes \u00e0 \u00ab\u00a0sondes locales\u00a0\u00bb<\/strong><\/p>\n

A l’aise dans l’univers microm\u00e9trique, l’industrie commence \u00e0 se rapprocher bellement du monde nanom\u00e9trique, de l’ultime miniaturisation. Pensez aux \u00e9l\u00e9ments qui constituent les puces \u00e9lectroniques, aux sources lasers de faible puissance, \u00e0 tous ces dispositifs r\u00e9alis\u00e9s en mat\u00e9riaux semi-conducteurs. Le nanomonde n’est plus tr\u00e8s loin.<\/p>\n

Les industriels ont ainsi un solide probl\u00e8me \u00e0 r\u00e9soudre. A cette \u00e9chelle, le moindre d\u00e9faut devient d\u00e9vastateur. Mais comment le rep\u00e9rer? Les fabricants commencent donc \u00e0 s’\u00e9quiper \u00e0 tour de bras en microscopes \u00e0 sonde locale (microscopes \u00e0 effet tunnel + \u00e0 force atomique). Ces espions dans l’infiniment petit leur permettent d’inspecter les produits dont la qualit\u00e9 de surface rev\u00eat une importance primordiale (matrices servant \u00e0 fabriquer les disques compacts par exemple).<\/p>\n

 <\/p>\n

Des dizaines d’entreprises se lancent<\/strong><\/div>\n
<\/div>\n

C’est ainsi que, en 1992, les ventes mondiales de microscopes \u00e0 sonde locale ont atteint 50 millions de dollars. C’est encore nanoscopique mais d\u00e9j\u00e0 quelque chose. En Europe, quelque deux cents appareils ont \u00e9t\u00e9 vendus l’an dernier pour un total de 15 millions de dollars. Trois fabricants se partagent pour l’instant ce d\u00e9but de march\u00e9: Digital Instruments, incontestablement le num\u00e9ro un, Park Scientific Instruments et Topometrix. Curieusement, alors qu’il faut entre une ann\u00e9e et demi et deux ans de travail pour fabriquer un seul microscope de ce type, ces trois fabricants rel\u00e8vent de la cat\u00e9gorie des petites et moyennes entreprises. Le g\u00e9ant IBM en fabrique de son c\u00f4t\u00e9 mais ne les commercialise pas. Probablement parce que d’autres terrains, encore plus fertiles (les m\u00e9moires informatiques \u00e0 tr\u00e8s haute capacit\u00e9), pointent \u00e0 l’horizon gr\u00e2ce aux nouveaux microscopes. En attendant, all\u00e9ch\u00e9es par le march\u00e9, des dizaines et des dizaines d’entreprises s’y lancent. Trop semble-t-il pour qu’elles puissent toutes survivre.<\/p>\n

Un mot encore sur ces nouveaux engins. Dans un proche avenir, ils pourraient \u00e9galement servir \u00e0 stocker des informations. Les sp\u00e9cialistes parlent d\u00e9j\u00e0 d’un syst\u00e8me constitu\u00e9 d’une centaine de pointes de microscope \u00e0 effet tunnel, mues par des moteurs pi\u00e9zo\u00e9lectriques. L’appareil permettrait d’engranger un milliard d’informations par centim\u00e8tre carr\u00e9 et aurait l’avantage non d\u00e9daignable de beaucoup mieux r\u00e9sister aux chocs que les disques durs conventionnels pour ordinateurs.<\/p>\n

R\u00e9alit\u00e9 virtuelle, dites-vous?<\/strong><\/div>\n
<\/div>\n

Au regard de son statut actuel (technologie essentiellement de laboratoire), l’univers nanoscopique d’Eric Drexler para\u00eet flotter sur un petit nuage rose. Dans les r\u00eaves de ce futurologue, les nanorobots parviennent \u00e0 r\u00e9aliser, mol\u00e9cule par mol\u00e9cule, une navette spatiale aussi fiable qu’une voiture. En m\u00e9decine, les interventions chirurgicales manuelles au bistouri sont, dans la plupart des cas, remplac\u00e9es par une injection de nanorobots qui m\u00e8nent l’op\u00e9ration par voie interne, en se d\u00e9pla\u00e7ant via le r\u00e9seau sanguin.<\/p>\n

Chez Drexler, les \u00e9nergies renouvelables connaissent enfin un franc succ\u00e8s. Des cellules solaires (photovolta\u00efques) nanoscopiques, capables de se dupliquer avec tr\u00e8s peu d’\u00e9nergie, remplacent les centrales \u00e9lectriques classiques. En mati\u00e8re d’enseignement, la \u00ab\u00a0r\u00e9alit\u00e9 virtuelle\u00a0\u00bb fait un tabac chez les \u00e9tudiants. Un casque recr\u00e9e un environnement tridimensionnel par le moyen d’images de synth\u00e8se; et une combinaison, pourvue de nombreux petits moteurs et capteurs, transmet au corps des sensations et des r\u00e9actions particuli\u00e8rement r\u00e9alistes. Les \u00e9tudiants peuvent ainsi – ce n’est qu’un exemple – se d\u00e9placer \u00ab\u00a0virtuellement\u00a0\u00bb dans un monde nanoscopique, voir, sentir et comprendre des ph\u00e9nom\u00e8nes normalement impalpables pour l’homme.<\/p>\n

Avec quelques bases scientifiques et de l’imagination, la liste des applications s’allonge tr\u00e8s rapidement. N’a-t-on pas dit que la nanotechnologie vaincrait la mort? Mais l’auteur de cette d\u00e9claration n’a rien \u00e0 voir avec Eric Drexler. Et puis, c’est une vieille histoire. Depuis la r\u00e9volution industrielle de la vapeur, ne dit-on pas la m\u00eame chose \u00e0 chaque fois qu’une technique nouvelle se met \u00e0 balbutier?<\/p>\n

Bibliographie<\/strong><\/div>\n
<\/div>\n

Unbounding the Future, the Nanotechnology Revolution, par E. Drexler, C. Peterson, G. Pergamit. New York, William Morrow & Company Inc., 1991.<\/p>\n

\u00ab\u00a0The Apostle of Nanotechnology\u00a0\u00bb, par Ivan Amato, in: Science, vol. 254, p. 1310-1311. Washington, 29 novembre 1991. (Ce volume de la revue \u00ab\u00a0Science\u00a0\u00bb contient en fait un dossier enti\u00e8rement d\u00e9di\u00e9 \u00e0 l’ultime miniaturisation et intitul\u00e9 \u00ab\u00a0Engineering a Small World: From Atomic Manipulation to Microfabrication\u00a0\u00bb, p. 1300 – 1341. Avec des articles de David H. Freedman, Robert Crawford, Gordon Graff, George M. Whitesides et al., Joseph A. Stroscio et Donald M. Eigler, Mani Sundaram et al., K. D. Wise et K. Najafi.)<\/p>\n

Molecular Magic, par S. Cobb. Washington D.C., Ad Astra, juin 1990.<\/p>\n

Local Probe Methods, Research Report, par Heinrich Rohrer. R\u00fcschlikon, IBM Research Division, Zurich Research Laboratory, 1991.<\/p>\n

\u00ab\u00a0Le microscope \u00e0 effet tunnel: cl\u00e9 de la nanotechnologie\u00a0\u00bb, par Martin Hug, in: Panorama IBM No 21. Zurich, mai 1992.<\/p>\n

\u00ab\u00a0Les microscopes \u00e0 sonde locale\u00a0\u00bb, par Kumar Wickramasinghe, in: Pour la Science No 146, p. 42-49. Paris, d\u00e9cembre 1989.<\/p>\n

\u00ab\u00a0Le petit monde de la nanotechnologie\u00a0\u00bb, par A. Dewdney, in: Pour la Science No 125, p. 108-111. Paris, mars 1988.<\/p>\n

\u00ab\u00a0Japan will fund Major Nanotechnology Project\u00a0\u00bb, par D. Swinbanks, in: Nature, vol. 352. Londres, ao\u00fbt 1991.<\/p>\n

Direct Coupling System between Nanometer World and Human World, par I. Hatamura et H. Morishita. Tokyo, Department of Mechanical Engineering for Production, The University of Tokyo, 1990.<\/p>\n

\u00ab\u00a0Des moteurs dans les puces\u00a0\u00bb, par Nicolas Henchoz, in: Journal de Gen\u00e8ve et Gazette de Lausanne, p. 16. Gen\u00e8ve, 23 octobre 1991.<\/p>\n

\u00ab\u00a0Une sonde qui voit les atomes\u00a0\u00bb, par Nicolas Henchoz, in: Journal de Gen\u00e8ve et Gazette de Lausanne, p. 20. Gen\u00e8ve, 9 novembre 1991.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

Et le nanot robot cr\u00e9a le monde en 6 minutes… … ce qui nous permit de nous reposer le reste de l’ann\u00e9e. C’est vrai, \u00e0 la fin! Scier, coller, souder, fondre, mouler, polir … au diable ces vieilleries! Puisque les scientifiques nous pr\u00e9disent l’ouvrier de r\u00eave, invisible \u00e0 l’oeil nu, \u2026 Lire plus \/ Read more<\/a><\/p>\n","protected":false},"author":1,"featured_media":0,"parent":0,"menu_order":0,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","template":"","meta":{"ngg_post_thumbnail":0},"_links":{"self":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/218"}],"collection":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages"}],"about":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/types\/page"}],"author":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/users\/1"}],"replies":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=%2Fwp%2Fv2%2Fcomments&post=218"}],"version-history":[{"count":2,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/218\/revisions"}],"predecessor-version":[{"id":220,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/218\/revisions\/220"}],"wp:attachment":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=%2Fwp%2Fv2%2Fmedia&parent=218"}],"curies":[{"name":"wp","href":"https:\/\/api.w.org\/{rel}","templated":true}]}}