{"id":822,"date":"2015-01-08T23:24:29","date_gmt":"2015-01-08T22:24:29","guid":{"rendered":"http:\/\/www.archipress.org\/wp\/?page_id=822"},"modified":"2015-01-21T15:05:39","modified_gmt":"2015-01-21T14:05:39","slug":"pourquoi-leurope-dominait-hier","status":"publish","type":"page","link":"https:\/\/www.archipress.org\/?page_id=822","title":{"rendered":"Pourquoi l’Europe dominait hier…"},"content":{"rendered":"

Pourquoi l’Europe dominait hier…
\net ce qui l’attend demain<\/h3>\n

Par David Cosandey<\/strong><\/p>\n

David Cosandey<\/em>, qui a \u00e9tudi\u00e9 \u00e0 l’Universit\u00e9 de Lausanne, est docteur en physique th\u00e9orique de l’Universit\u00e9 de Berne. Il travaille \u00e0 Zurich dans la mod\u00e9lisation math\u00e9matique financi\u00e8re. Il a publi\u00e9 en 1997, avec l’aide de la Fondation Veillon, sur le th\u00e8me qu’il traite dans l’article qui suit, une somme de 470 pages, Le Secret de l’Occident. Du miracle pass\u00e9 au marasme pr\u00e9sent<\/em> (Paris, Arl\u00e9a).<\/p>\n

\"LePendant des si\u00e8cles, l’\u00e9clatant succ\u00e8s europ\u00e9en est rest\u00e9 un myst\u00e8re envelopp\u00e9 d’une \u00e9nigme, pour reprendre l’expression de Churchill. Comment se fait-il en effet qu’une r\u00e9gion du monde, une seule, ait connu un d\u00e9veloppement aussi fulgurant? Pourquoi les Europ\u00e9ens avaient-ils, par exemple, invent\u00e9 la science et l’industrie modernes, et non l’Inde ou la Chine?<\/p>\n

Cette \u00e9nigme suscite traditionnellement deux types de r\u00e9actions chez les penseurs. Les uns jugent tout \u00e0 fait naturels les succ\u00e8s de l’Europe, qu’ils expliquent par la sup\u00e9riorit\u00e9 culturelle, religieuse ou g\u00e9n\u00e9tique de ses habitants, rel\u00e9guant ainsi sans \u00e9tats d’\u00e2me les peuples non-europ\u00e9ens dans l’ombre et le m\u00e9pris. Les autres, supportant mal des conclusions aussi m\u00e9prisantes, pr\u00e9f\u00e8rent nier la r\u00e9alit\u00e9 objective de cette sup\u00e9riorit\u00e9 europ\u00e9enne momentan\u00e9e. Ils pr\u00f4nent donc le relativisme culturel (toutes les soci\u00e9t\u00e9s se valent), faisant bon march\u00e9 de la formidable puissance militaro-\u00e9conomique qu’a exerc\u00e9e l’Europe gr\u00e2ce \u00e0 ses progr\u00e8s technologiques, ou attribuent aux civilisations extra-europ\u00e9ennes de jadis tout le m\u00e9rite des r\u00e9alisations europ\u00e9ennes modernes. Ce faisant, ils n\u00e9gligent d’expliquer pourquoi des civilisations dont ils jugent les d\u00e9buts si brillants, ont tellement ralenti par la suite.<\/p>\n

L’histoire des civilisations, l’histoire des sciences et des techniques en particulier, ont longtemps tr\u00e9buch\u00e9 sur ce dilemme. Cependant, il semble qu’aujourd’hui on puisse enfin d\u00e9velopper une vision claire et coh\u00e9rente des causes g\u00e9n\u00e9rales du progr\u00e8s, et en particulier de l’\u00e9mergence de la modernit\u00e9. Comme j’ai tent\u00e9 de le montrer dans un ouvrage r\u00e9cent (Le Secret de l’Occident<\/em>), le progr\u00e8s d’une civilisation, de sa culture, de ses sciences, de ses techniques, d\u00e9coule au premier chef de la concomitance de deux facteurs: la prosp\u00e9rit\u00e9 \u00e9conomique et la division politique stable.<\/p>\n

En effet, chaque fois qu’une r\u00e9gion est \u00e0 la fois \u00e9conomiquement dynamique et constitu\u00e9e d’\u00c9tats rivaux durables, elle va vers le plus et le mieux, ses connaissances scientifiques, sa litt\u00e9rature et ses arts se d\u00e9veloppent et s’\u00e9panouissent. Inversement, chaque fois qu’une r\u00e9gion glisse dans un syst\u00e8me d’unit\u00e9 totale ou de division politique instable ou de marasme \u00e9conomique, ses progr\u00e8s ralentissent ou s’arr\u00eatent. Il se trouve que la civilisation occidentale a b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 beaucoup plus longtemps que toute autre civilisation de la conjonction d’une \u00e9conomie prosp\u00e8re et d’une division politique stable. Je postule que telle est la raison de son extraordinaire succ\u00e8s.<\/p>\n

L’essor \u00e9conomique et la division politique stable soutiennent le progr\u00e8s de multiples fa\u00e7ons.<\/p>\n

La prosp\u00e9rit\u00e9 commerciale, en produisant un surplus, permet tout d’abord \u00e0 une frange de la population de se consacrer \u00e0 des t\u00e2ches non imm\u00e9diatement productives, ce qui stimule les arts et les sciences. De surcro\u00eet, les marchands et les hommes d’affaires influent eux-m\u00eames et de mani\u00e8re directe sur le progr\u00e8s des connaissances. Pouss\u00e9s par leur amour du calcul et du chiffre, ils soutiennent les math\u00e9matiques et les math\u00e9maticiens; ce soutien ne s’est jamais d\u00e9menti, des marchands-navigateurs sum\u00e9riens de 2800 av. J-.C. jusqu’aux n\u00e9gociants en produits d\u00e9riv\u00e9s de l’aube de l’an 2000. La passion que des hommes d’affaires pour la mesure du temps (le temps c’est de l’argent!) leur a fait subventionner le d\u00e9veloppement de l’horlogerie. Leur go\u00fbt du voyage les a conduits \u00e0 soutenir l’am\u00e9lioration des transports et de la cartographie. L’int\u00e9r\u00eat naturel qu’ils portent aux inventions derri\u00e8re toute invention, ils voient pointer un b\u00e9n\u00e9fice leur a fait patronner des recherches technologiques.<\/p>\n

La division politique stable, quant \u00e0 elle, contribue au progr\u00e8s de la civilisation en multipliant les centres de pouvoir et les l\u00e9gislations, qui se font alors une concurrence g\u00e9n\u00e9ratrice de libert\u00e9. Aucun gouvernement, en effet, ne peut \u00e9touffer une forme d’art, une id\u00e9e originale, une nouvelle machine, si ses auteurs peuvent, \u00e0 la premi\u00e8re menace, se r\u00e9fugier dans un pays voisin. Aucun souverain ne peut faire preuve d’un exc\u00e8s de tyrannie, lorsque ses sujets ont la possibilit\u00e9 de s’exiler ais\u00e9ment. Aujourd’hui m\u00eame, par exemple, si les c\u00e9r\u00e9ales g\u00e9n\u00e9tiquement modifi\u00e9es ont pu entamer une carri\u00e8re commerciale, c’est \u00e0 la diversit\u00e9 des r\u00e9glementations occidentales qu’elles le doivent: ce que l’Union europ\u00e9enne interdit, les \u00c9tats-Unis peuvent l’autoriser, et vice-versa.<\/p>\n

La division politique stable pousse en outre les princes \u00e0 rivaliser de prestige entre eux, pour le plus grand bien des savants, des artistes d’avant-garde et des penseurs. Elle les pousse \u00e9galement \u00e0 se passionner pour des am\u00e9liorations techniques leur permettant de tenir la drag\u00e9e militaire haute \u00e0 leurs multiples voisins.<\/p>\n

Bref, la comp\u00e9tition entre Etats durables est, pour tous et de tous les points de vue, un stimulant incomparable.<\/p>\n

Commer\u00e7ants et militaires sont tendus vers l’efficacit\u00e9, l’exactitude, le calcul, la mesure, le pragmatisme, ils ont le go\u00fbt de l’effort, le sens de l’organisation. A mesure qu’ils s’organisent en une classe sociale puissante ce qu’ils peuvent faire dans des \u00c9tats rivaux durables , leur mentalit\u00e9 s’impose \u00e0 l’ensemble de la soci\u00e9t\u00e9, dissipant les superstitions et les croyances magiques, stimulant la raison et la pens\u00e9e scientifique.<\/p>\n

Ainsi sont apparues les universit\u00e9s, institutions fondamentales de l’\u00e9mergence intellectuelle occidentale. Les premi\u00e8res d’entre elles, Bologne, Paris, Oxford, \u00e9taient des \u00e9coles priv\u00e9es, vivant des redevances de leurs \u00e9tudiants. La prosp\u00e9rit\u00e9 ambiante a donc permis leur succ\u00e8s, alors que la stagnation \u00e9conomique avait entra\u00een\u00e9 l’\u00e9chec des \u00e9coles fond\u00e9es avant le XIe si\u00e8cle. D\u00e8s l’origine, les universit\u00e9s, bouillonnant d’id\u00e9es contestataires, ont exasp\u00e9r\u00e9 les autorit\u00e9s politiques et religieuses. Les enseignants ne durent de survivre qu’\u00e0 la possibilit\u00e9 qu’ils avaient de fuir dans l’\u00c9tat d’un prince voisin. Ce dernier les accueillait \u00e0 bras ouverts, trop content de contrarier un rival et de lui d\u00e9rober une source de prestige.<\/p>\n

Que l’on parle des Grecs du VIe si\u00e8cle avant notre \u00e8re, des Mayas de l’\u00e9poque classique ou des \u00c9tats-Unis et de l’Union Sovi\u00e9tique au XXe si\u00e8cle, toutes les r\u00e9gions du monde ayant b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 \u00e0 la fois d’une \u00e9conomie \u00e9panouie et d’une division politique stable ont connu des progr\u00e8s rapides. Inversement, les r\u00e9gions n’ayant pas eu cette chance, parce qu’elles faisaient partie d’un empire unifi\u00e9, ou qu’elles souffraient d’une division politique instable (leurs fronti\u00e8res valsaient, la guerre civile les d\u00e9chirait, etc.), ou que leur \u00e9conomie \u00e9tait d\u00e9prim\u00e9e, ont r\u00e9gress\u00e9, voire d\u00e9clin\u00e9. Il s’agit l\u00e0 d’une loi, semble-t-il, qui se v\u00e9rifie en tout temps et en tout lieu. Cette loi explique, en particulier, les diff\u00e9rentes phases de l’histoire de l’Occident: le miracle grec et la stagnation romaine, les t\u00e9n\u00e8bres du haut Moyen Age et la grande ascension qui a commenc\u00e9 vers l’an mille et s’est poursuivie jusqu’\u00e0 l’\u00e9poque contemporaine.<\/p>\n

Aux IXe-VIIIe si\u00e8cles avant J.-C. s’est constitu\u00e9 en Gr\u00e8ce et dans le bassin de la mer \u00c9g\u00e9e un ensemble d’\u00c9tats unis par une culture et une langue communes. Malgr\u00e9 leurs conflits fr\u00e9quents, ces cit\u00e9s-Etats se sont maintenus pendant plusieurs si\u00e8cles, tout en \u00e9tant anim\u00e9s d’un commerce et d’un artisanat florissants. C’est alors que les Grecs ont invent\u00e9, ou totalement renouvel\u00e9, le th\u00e9\u00e2tre, la po\u00e9sie, la philosophie, l’astronomie, les math\u00e9matiques, la physique, la biologie et la m\u00e9decine.<\/p>\n

Apr\u00e8s le IIIe si\u00e8cle, toutefois, ce miracle grec, comme on l’appelle, s’est estomp\u00e9: suite \u00e0 un affaissement d\u00e9mographique, l’\u00e9conomie a d\u00e9clin\u00e9, et les fronti\u00e8res de la r\u00e9gion se sont mises \u00e0 fluctuer brutalement; en cons\u00e9quence, le progr\u00e8s culturel et scientifique s’est interrompu.<\/p>\n

L’empire romain a \u00e9tendu peu \u00e0 peu son emprise \u00e0 toute la M\u00e9diterran\u00e9e, imposant un syst\u00e8me d’unit\u00e9 totale. Parall\u00e8lement, son \u00e9conomie s’est mise \u00e0 stagner, puis elle a sombr\u00e9 dans une large mesure \u00e0 cause de cette unit\u00e9 impos\u00e9e. La culture et la science ont, elles aussi, stagn\u00e9 puis d\u00e9clin\u00e9. Il n’est pas besoin de chercher ailleurs la cl\u00e9 de la d\u00e9cadence romaine.<\/p>\n

Du Ve au Xe si\u00e8cle, p\u00e9riode qui s\u00e9pare la d\u00e9sint\u00e9gration de l’empire romain de l’an mille environ, les barbares ont envahi l’Europe, provoquant dans tout l’ouest du continent une situation de division politique instable et de d\u00e9pression \u00e9conomique, qui a entra\u00een\u00e9 la grave r\u00e9gression culturelle d’une \u00e9poque justement nomm\u00e9e Age des T\u00e9n\u00e8bres.<\/p>\n

A partir du XIe si\u00e8cle, l’Europe occidentale se redresse, lorsqu’en son sein se cristallisent plusieurs \u00c9tats concurrents et solides, lanc\u00e9s dans une expansion commerciale et manufacturi\u00e8re tous azimuts. Ces royaumes europ\u00e9ens ont beau \u00eatre constamment en guerre entre eux, leurs fronti\u00e8res restent essentiellement stables. Les principaux d’entre eux vont m\u00eame se maintenir pendant un mill\u00e9naire. C’est alors que l’on voit l’Europe occidentale triompher sur les plans culturel et scientifique, se succ\u00e9der la Renaissance, les Lumi\u00e8res, la R\u00e9volution industrielle, l’\u00e9mergence de la d\u00e9mocratie et l’explosion scientifique moderne.<\/p>\n

Les civilisations extra-europ\u00e9ennes, en revanche, n’ont pas b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 de mani\u00e8re aussi durable d’une concomitance de l’essor \u00e9conomique et de la division politique stable. Certes, elles ont connu des p\u00e9riodes de division relativement stable et d’aisance commerciale, le Moyen-Orient du IXe au XIe si\u00e8cle, l’Inde du IIIe au VIIe si\u00e8cle, la Chine du VIIIe au XIIIe si\u00e8cle, pendant lesquelles les Arabes ont d\u00e9velopp\u00e9 l’optique, l’alg\u00e8bre, la m\u00e9decine, les Indiens ont invent\u00e9 le z\u00e9ro et les chiffres positionnels, les Chinois ont mis au point des cosmologies sup\u00e9rieures, ainsi que la poudre, l’imprimerie, la jonque de haute mer, etc. Mais ces p\u00e9riodes de concomitance favorable n’ont pas dur\u00e9 aussi longtemps qu’en Europe. Elles ont \u00e9t\u00e9 interrompues par des situations d’empire universel, ou de chaos int\u00e9rieur et de fronti\u00e8res sans cesse fluctuantes, ou encore de d\u00e9tresse \u00e9conomique. Ce diff\u00e9rentiel suffit en fait \u00e0 expliquer l’\u00e9chec relatif des non-Europ\u00e9ens et le succ\u00e8s exceptionnel des Occidentaux, qui les a conduit sur toutes les terres et tous les oc\u00e9ans du globe \u00e0 partir du XVIe si\u00e8cle, puis, au XIXe si\u00e8cle, \u00e0 la domination du monde.<\/p>\n

Durant la premi\u00e8re moiti\u00e9 du XXe si\u00e8cle, l’Europe occidentale s’est tout \u00e0 coup trouv\u00e9e trop petite pour h\u00e9berger plusieurs grandes puissances en conflit: ses nouvelles technologies militaires les avions, les blind\u00e9s impliquaient de jouer sur un espace plus large. C’est pourquoi le syst\u00e8me d’\u00c9tats europ\u00e9en s’est effondr\u00e9 au cours de la Seconde guerre mondiale, supplant\u00e9 par le couple plus vaste Am\u00e9rique du Nord-Russie. Ce couple a reconstitu\u00e9, \u00e0 plus grande \u00e9chelle, un syst\u00e8me d’\u00c9tats stables et prosp\u00e8res, favorable au progr\u00e8s technologique.<\/p>\n

Dans les ann\u00e9es 1970, cependant, le d\u00e9veloppement des bombes H et des missiles intercontinentaux a fini par rendre la Terre elle-m\u00eame trop exigu\u00eb: la guerre entre grandes puissances est devenue impossible. La paix nucl\u00e9aire s’\u00e9tant impos\u00e9e, les \u00c9tats-Unis et l’URSS ont au fond cess\u00e9 de se faire concurrence et leur duopole s’est \u00e9croul\u00e9 en 1989-91.<\/p>\n

Aujourd’hui, les puissances ne peuvent plus gu\u00e8re rivaliser que sur le terrain de l’\u00e9conomie et sur celui du prestige, mais \u00e0 l’\u00e9chelle plan\u00e9taire. Dans cette perspective, si l’Europe devenait un jour un \u00c9tat politiquement unifi\u00e9, ce dernier ne mettrait pas en p\u00e9ril le progr\u00e8s de la science et de la culture, puisqu’il se trouverait aussit\u00f4t en concurrence avec d’autres \u00c9tats d’envergure comparable: les \u00c9tats-Unis, le Japon, la Chine…<\/p>\n

Cela dit, pourquoi seule l’Europe a-t-elle b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 de param\u00e8tres \u00e9conomiques et politiques aussi favorables, et ce de fa\u00e7on continue pendant un mill\u00e9naire? La r\u00e9ponse la plus vraisemblable \u00e0 cette question est g\u00e9ographique. Des quatre grands foyers de civilisation (Europe, Moyen-Orient, Inde, Chine), l’Europe occidentale a le profil littoral le plus complexe: elle est en effet une p\u00e9ninsule de p\u00e9ninsules, son pourtour est constitu\u00e9 de mers int\u00e9rieures, de d\u00e9troits, d’isthmes, de golfes, d’\u00eeles. La dimension fractale de sa ligne de c\u00f4te la dimension fractale est une grandeur math\u00e9matique mesurant la complexit\u00e9 d’une ligne bris\u00e9e est beaucoup plus \u00e9lev\u00e9e que celle des autres continents. J’ai baptis\u00e9 cette silhouette g\u00e9ographique avantageuse une thalassographie articul\u00e9e.<\/p>\n

Sur le long terme, cette configuration littorale a favoris\u00e9, en Europe, la formation d’\u00c9tats rivaux durables, ainsi que le d\u00e9veloppement du commerce. Les mers qui entourent tout ou partie de l’Angleterre, de la France, de l’Espagne, de la Su\u00e8de, du Danemark, etc., ont servi \u00e0 ces pays de d\u00e9fenses naturelles et ont donc favoris\u00e9 leur long\u00e9vit\u00e9. Elles ont en m\u00eame temps d\u00e9multipli\u00e9 \u00e0 leur profit les possibilit\u00e9s de faire du commerce, le transport maritime \u00e9tant infiniment plus avantageux que le transport terrestre.<\/p>\n

Ce serait donc \u00e0 un hasard de la g\u00e9ologie que la civilisation occidentale devrait son destin original: le continent europ\u00e9en offrait une v\u00e9ritable infrastructure naturelle de d\u00e9veloppement. La m\u00eame configuration thalassographique se v\u00e9rifie, mais \u00e0 plus petite \u00e9chelle, pour la Gr\u00e8ce et le bassin de la mer \u00c9g\u00e9e, expliquant l’essor grec antique.<\/p>\n

La Chine, l’Inde et le Moyen-Orient, en revanche, sont des masses continentales \u00e9normes et indiff\u00e9renci\u00e9es, dont la plupart des points sont priv\u00e9s d’acc\u00e8s \u00e0 la mer. Leur configuration littorale d\u00e9favorable a fragilis\u00e9 leurs divisions politiques et affaibli leur commerce.<\/p>\n

O n peut se demander pourquoi les th\u00e9ories que je sugg\u00e8re ici, simples somme toute, mais d’un pouvoir explicatif important, n’ont pas \u00e9t\u00e9 formul\u00e9es plus t\u00f4t. Il y a \u00e0 cela deux raisons principales, je crois.<\/p>\n

La premi\u00e8re est que les humains ont de tout temps \u00e9t\u00e9 fascin\u00e9s par l’id\u00e9e d’empire unifi\u00e9, \u00e9voquant la paix, l’harmonie, le grand ensemble gouvern\u00e9 par un empereur sage et bienveillant. Les gens sont en g\u00e9n\u00e9ral rebut\u00e9s, pour ne pas dire scandalis\u00e9s, par l’id\u00e9e que les rivalit\u00e9s et les conflits entre Etats puissent avoir sur leur vie des effets positifs majeurs. Plus g\u00e9n\u00e9ralement, l’on aime \u00e0 trouver aux choses grandioses des causes grandioses, pr\u00e9f\u00e9rant laisser de c\u00f4t\u00e9, \u00e0 propos du progr\u00e8s culturel et scientifique, les motivations consid\u00e9r\u00e9es comme viles, ou trop terre-\u00e0-terre.<\/p>\n

La seconde est qu’au cours des r\u00e9centes d\u00e9cennies, l’histoire a fait de grands progr\u00e8s, l’histoire des sciences en particulier qui, depuis son institutionalisation universitaire dans les ann\u00e9es 1940-50, a produit un grand nombre de travaux innovateurs. Les \u00e9l\u00e9ments th\u00e9oriques que je sugg\u00e8re ici figuraient, \u00e9parpill\u00e9s, dans des centaines d’ouvrages r\u00e9cents. Il restait \u00e0 d\u00e9couvrir le fil rouge qui les reliait.<\/p>\n

Les th\u00e9ories que je propose, parce qu’elles \u00e9noncent les conditions n\u00e9cessaires et suffisantes du progr\u00e8s de la civilisation, devraient permettre de passer peu \u00e0 peu d’une vision cin\u00e9matique de l’histoire des civilisations, purement descriptive, \u00e0 une vision dynamique, permettant d’identifier les forces \u00e0 l’oeuvre et de projeter certaines \u00e9volutions possibles.<\/p>\n

Dans le monde actuel, enfant, je le rappelle, de la paix nucl\u00e9aire, il me semble possible de distinguer trois tendances majeures divergentes.<\/p>\n

La premi\u00e8re est la tendance \u00e0 l’unification \u00e9conomique du monde, qui se manifeste \u00e0 travers des accords comme ceux du GATT et de son successeur, l’Organisation Mondiale du Commerce. Ces accords visent \u00e0 lever toute forme d’obstacle \u00e0 la circulation des marchandises et au rachat transfrontalier des entreprises, \u00e0 fin ultime de constituer un jour un domaine douanier plan\u00e9taire unique. Cette tendance, si elle se poursuivait jusqu’\u00e0 son terme, conduirait \u00e0 un nivellement technologique et industriel mondial; les gouvernements renon\u00e7ant \u00e0 prot\u00e9ger leur \u00e9conomie et leurs habitants, une classe super-riche, regroupant peut-\u00eatre 10% de la population de chaque pays, s’installerait aux commandes, imposant ses volont\u00e9s \u00e0 une immense sous-classe paup\u00e9ris\u00e9e.<\/p>\n

La deuxi\u00e8me tendance pousse au contraire \u00e0 l’\u00e9clatement des \u00c9tats, au morcellement politique g\u00e9n\u00e9ralis\u00e9. Les \u00c9tats n’ont en derni\u00e8re analyse de raison d’\u00eatre que la d\u00e9fense et la guerre. D\u00e8s lors que la paix nucl\u00e9aire rend les grandes guerres impossibles, les conflits se morcellent, d’o\u00f9 l’actuelle multiplication des petits conflits f\u00e9odaux anarchiques (Yougoslavie, Caucase, Afghanistan, Somalie, Lib\u00e9ria, etc.), le n\u00e9o-d\u00e9veloppement des villes fortifi\u00e9es (\u00c9tats-Unis, Br\u00e9sil, Nig\u00e9ria), la r\u00e9surgence des brigands de grand chemin (Russie, Caucase, Mexique) et la r\u00e9apparition des pirates (Indon\u00e9sie, Br\u00e9sil). Cette tendance, si elle se poursuivait jusqu’\u00e0 son terme, conduirait \u00e0 une sorte de nouveau Moyen Age.<\/p>\n

La troisi\u00e8me, enfin, est la tendance \u00e0 la formation de grands blocs continentaux (ALENA, Mercosur, EEE, Asean, Inde, Chine), relativement protectionnistes et se faisant concurrence les uns aux autres.<\/p>\n

Il est difficile de dire laquelle des trois tendances l’emportera. Mais les th\u00e9ories expos\u00e9es plus haut sugg\u00e8rent \u00e0 l’\u00e9vidence que la troisi\u00e8me – le d\u00e9veloppement de blocs politiques stables et rivaux, attach\u00e9s \u00e0 d\u00e9velopper leur \u00e9conomie et leur commerce – serait la plus favorable \u00e0 une poursuite du progr\u00e8s de la civilisation.<\/p>\n

Pour ce qui concerne sp\u00e9cifiquement l’Europe, on peut dire, me semble-t-il, ceci: elle est aujourd’hui essouffl\u00e9e d\u00e9mographiquement, et donc \u00e9conomiquement, et la disparition du risque militaire a r\u00e9duit \u00e0 peu de chose la rivalit\u00e9 entre ses \u00c9tats ou avec des \u00c9tats ext\u00e9rieurs. Cette situation peu stimulante la conduit tendanciellement \u00e0 la stagnation.<\/p>\n

Mais cette situation n’est pas fix\u00e9e pour l’\u00e9ternit\u00e9. Premi\u00e8rement, parce que les gouvernements europ\u00e9ens peuvent essayer de remonter la pente de leur propre chef, en prenant par exemple des mesures \u00e9nergiques contre la d\u00e9natalit\u00e9. Secondement et surtout, parce que de nouveaux ennemis ext\u00e9rieurs pourraient surgir, qui aiguiseraient utilement l’aiguillon des rivalit\u00e9s inter-\u00e9tatiques. Je songe \u00e0 la mont\u00e9e de pays comme l’Iran, l’Irak, la Turquie, en pleine expansion d\u00e9mographique (dans vingt ans, l’Iran et la Turquie auront chacun autant d’habitants que la Russie aujourd’hui) et qui travaillent \u00e0 se doter d’armements sophistiqu\u00e9s. Ou, plus g\u00e9n\u00e9ralement, \u00e0 la mont\u00e9e du monde musulman, qui pourrait pr\u00e9senter toutes les exigences requises pour prendre le relais du monde communiste dans le r\u00f4le d’adversaire principal de l’Europe de l’Ouest: m\u00eame foi belliqueuse que la Russie l\u00e9nino-stalinienne, m\u00eame hostilit\u00e9 envers l’Occident, m\u00eame primat du groupe sur l’individu, m\u00eames masses nombreuses et mis\u00e9rables (ces \u00e9l\u00e9ments \u00e9tant d’ailleurs li\u00e9s, comme nous l’avons vu: autant la richesse stimule la vie intellectuelle d’une soci\u00e9t\u00e9, autant la pauvret\u00e9 favorise l’obscurantisme), et… m\u00eame capacit\u00e9 d’enchanter l’intelligentsia occidentale.<\/p>\n

Pour les \u00c9tats-Unis, le nouvel ennemi utile, le nouvel \u00ab\u00a0empire du mal\u00a0\u00bb, serait plut\u00f4t la Chine. Totalitaire, \u00e9norme, expansionniste, mena\u00e7ante pour les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains en Extr\u00eame-Orient, pleine de ressentiment \u00e0 l’\u00e9gard de l’Occident, elle pourrait faire, \u00e0 l’avenir, un adversaire presque id\u00e9al.<\/p>\n

Le Temps strat\u00e9gique, No 82, Gen\u00e8ve, juillet-ao\u00fbt 1998.<\/p>\n

<\/div>\n
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ADDENDA<\/strong><\/p>\n

Petite introduction \u00e0 la \u00ab\u00a0thalassographie articul\u00e9e\u00a0\u00bb<\/strong><\/p>\n

Soit trois profils c\u00f4tiers imaginaires. On discerne ais\u00e9ment lequel a le dessin des c\u00f4tes le plus articul\u00e9.<\/p>\n

\"\"<\/p>\n

Le premier littoral ne poss\u00e8de ni saillants ni rentrants; il est quasiment rectiligne. Chaque secteur y est \u00e9quivalent \u00e0 tous les autres. Le deuxi\u00e8me poss\u00e8de des indentations, mais pas assez pour que sa silhouette soit vraiment complexe et articul\u00e9e; sa configuration reste lin\u00e9aire. Seule la troisi\u00e8me thalassographie (du grec thalassa<\/em>, la mer, et graphein<\/em>, \u00e9crire) m\u00e9rite l’\u00e9pith\u00e8te d’articul\u00e9e. Ce troisi\u00e8me profil abonde en isthmes, en p\u00e9ninsules et en \u00eeles. Il a des mers int\u00e9rieures et des golfes. Ses excroissances de terres pointent en direction des rivages oppos\u00e9s. Cet agencement encourage les habitants \u00e0 s’aventurer en mer, facilite les \u00e9changes commerciaux et prot\u00e8ge d’invasions venant de plusieurs directions.<\/p>\n

Comment calculer un \u00ab\u00a0indice de thalassographie\u00a0\u00bb?<\/strong><\/p>\n

Au-del\u00e0 de l’intuition, la thalassographie articul\u00e9e est une notion qu’il est possible de chiffrer.<\/p>\n

Un premier moyen de le faire, fort grossier, consiste \u00e0 d\u00e9terminer la part des p\u00e9ninsules et des \u00eeles dans la superficie totale, c’est-\u00e0-dire \u00e0 chiffrer l’importance des membres par opposition au tronc (on parle alors d’indice de marinit\u00e9). Cet indice met en \u00e9vidence le caract\u00e8re tr\u00e8s maritime de l’Europe, par opposition au caract\u00e8re terrien de l’Islam, de l’Inde et de la Chine. Mais l’indice de marinit\u00e9 revient simplement \u00e0 chiffrer les appr\u00e9ciations faites \u00e0 l’il devant la carte, puisque la r\u00e9partition entre le tronc et les membres est en grande partie arbitraire.<\/p>\n

Une autre moyen de chiffrer la thalassographie articul\u00e9e est de mesurer la distance \u00e0 la mer du point le plus isol\u00e9 au centre des terres. A superficie \u00e9gale, on peut s’attendre \u00e0 ce que la r\u00e9gion dont la thalassographie est la plus articul\u00e9e ait en g\u00e9n\u00e9ral des points centraux plus proches de la c\u00f4te. L\u00e0 encore, les chiffres donnent une sup\u00e9riorit\u00e9 nette \u00e0 l’Europe, dont les points les plus isol\u00e9s sont deux fois plus proches de la mer que les points isol\u00e9s des trois autres r\u00e9gions.<\/p>\n

On peut calculer un troisi\u00e8me indice, plus performant, en d\u00e9terminant, pour chacun des points des quatre r\u00e9gions, la distance moyenne \u00e0 la mer.<\/p>\n

Un moyen encore plus \u00e9labor\u00e9 de calculer un indice de thalassographie articul\u00e9e consiste \u00e0 mesurer le rapport entre la longueur des c\u00f4tes et la superficie de la r\u00e9gion \u00e9tudi\u00e9e. Ce rapport est appel\u00e9 indice de d\u00e9veloppement. L\u00e0 encore, l’Europe b\u00e9n\u00e9ficie de l’interp\u00e9n\u00e9tration des terres et des mers la plus forte, et donc la plus propice au commerce et \u00e0 la division politique stable.<\/p>\n

Mais rien ne vaut l’indice fractal!<\/strong><\/p>\n

Mais l’indice le plus objectif est l’indice fractal. Le concept de dimension fractale, invent\u00e9 par le math\u00e9maticien fran\u00e7ais Beno\u00eet Mandelbrot dans les ann\u00e9es 60, s’applique aux courbes complexes infiniment longues mais circonscrites \u00e0 un domaine fini. Par leurs nombreux plis et replis, ces courbes remplissent mieux l’\u00e9tendue dans laquelle elles se d\u00e9ploient que les courbes simples habituelles.<\/p>\n

La dimension fractale d’une ligne complexe est toujours comprise entre une ligne simple qui a une dimension (enti\u00e8re) de 1, et une surface qui a une dimension de 2. Plus une courbe est complexe et articul\u00e9e, plus sa dimension fractale est \u00e9lev\u00e9e, c’est-\u00e0-dire proche de 2. Pour la c\u00f4te occidentale de la Grande-Bretagne, tr\u00e8s d\u00e9chiquet\u00e9e, la dimension fractale vaut 1,25. Pour des profils moins d\u00e9chiquet\u00e9s, comme celui du Portugal, entre 1,13 et 1,15. Pour le littoral presque rectiligne de l’Afrique du Sud, 1,02 seulement.<\/p>\n

Pour calculer la dimension fractale d’un littoral, on mesure la vitesse d’allongement de sa longueur lorsqu’on la mesure avec des segments de plus en plus petits, entre 10 et 1000 km, et donc de plus en plus pr\u00e9cis. L’indice fractal confirme une fois encore le net avantage de l’Europe.<\/p>\n

D. C.<\/p>\n

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Dimension fractale des domaines g\u00e9ographiques de quatre civilisations (sans leurs \u00eeles)<\/strong><\/p>\n

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ADDENDA<\/strong><\/p>\n

Le monde divis\u00e9 en blocs commerciaux<\/strong><\/p>\n

Situation 1998<\/p>\n

L’Accord de libre-\u00e9change nord am\u00e9ricain ou<\/strong> ALENA<\/strong> (North American Free Trade Agreement <\/em>NAFTA), sign\u00e9 en 1990 par le Canada, les \u00c9tats-Unis et le Mexique, est entr\u00e9 en vigueur le 1er janvier 1994. L’ALENA devrait, en une quinzaine d’ann\u00e9es, supprimer toutes les barri\u00e8res freinant encore le commerce de biens et de services entre les trois pays-membres.<\/p>\n

L’Union Europ\u00e9enne (UE) <\/strong>est le nom donn\u00e9, depuis la signature du trait\u00e9 de Maastricht (novembre 1993), \u00e0 la Communaut\u00e9 \u00c9conomique Europ\u00e9enne (CEE), elle-m\u00eame cr\u00e9\u00e9e par le trait\u00e9 de Rome en 1957 et \u00e9largie le 1er janvier 1995 \u00e0 quinze pays (Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, Finlande, France, Gr\u00e8ce, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni et Su\u00e8de). L’Union Europ\u00e9enne devrait parachever son int\u00e9gration \u00e9conomique par la cr\u00e9ation, le 1er janvier 1999, d’une monnaie europ\u00e9enne unique, l’Euro.<\/p>\n

L’Association des nations du sud-est asiatique (ASEAN)<\/strong> a \u00e9t\u00e9 cr\u00e9\u00e9e en 1967 par l’Indon\u00e9sie, la Malaisie, les Philippines, Singapour et la Tha\u00eflande, \u00e0 l’instigation des Am\u00e9ricains, alors en pleine guerre du Vietnam, anxieux de contrer l’influence communiste dans la r\u00e9gion. Mais aujourd’hui, les objectifs essentiels de l’ASEAN sont d’int\u00e9gration \u00e9conomique. Les \u00c9tats de Brunei et du Vietnam ont rejoint l’ASEAN en 1984 et 1995 respectivement. Il est pr\u00e9vu que la Birmanie, le Cambodge et le Laos fassent \u00e9galement partie de la future zone de libre-\u00e9change qu’envisage l’ASEAN pour 2008.<\/p>\n

Le Mercosur ou march\u00e9 commun du Sud<\/strong> (Mercado Com\u00fan del Sur<\/em>) a \u00e9t\u00e9 inaugur\u00e9 le 1er janvier 1995. Il comprend l’Argentine, le Paraguay, l’Uruguay et le Br\u00e9sil. Le Mercosur devrait graduellement abolir toute barri\u00e8re douani\u00e8re pour plus de 90% des biens \u00e9chang\u00e9s entre les \u00c9tats membres, et \u00e9tablir, face \u00e0 l’ext\u00e9rieur, des tarifs d’importation communs<\/p>\n

Existe-t-il des valeurs universelles ?<\/strong><\/p>\n

Le relativisme culturel <\/strong>postule que toute culture, parce qu’issue d’un environnement socioculturel particulier, engendre son propre syst\u00e8me de valeurs, et qu’en cons\u00e9quence il ne peut exister aucune v\u00e9rit\u00e9 universelle. Le relativisme culturel est l’exact oppos\u00e9 de l’ethnocentrisme, lequel juge en effet les autres cultures en fonction de son propre syst\u00e8me de valeurs, syst\u00e8me qu’il consid\u00e8re universel. Le relativisme culturel a marqu\u00e9 de fa\u00e7on durable l’anthropologie am\u00e9ricaine.<\/p>\n

Les marchands-navigateurs sum\u00e9riens<\/strong> se sont \u00e9panouis de 3500 \u00e0 2000 av. J-.C. environ dans le sud de l’Irak actuel, et ont particip\u00e9 \u00e0 la civilisation la plus pr\u00e9coce de l’histoire. Ils furent les premiers \u00e0 se constituer en cit\u00e9s-\u00c9tats, \u00e0 construire de grandes pyramides (ziggourats) et \u00e0 d\u00e9velopper une soci\u00e9t\u00e9 urbaine \u00e9volu\u00e9e. Ils sont les inventeurs de l’\u00e9criture. Leur \u00e9criture, pictographique, puis syllabique remonte \u00e0 environ 3200-3100 avant notre \u00e8re. Ils sont aussi les fondateurs des math\u00e9matiques \u00e9crites. Sumer se trouvait alors au centre d’un immense r\u00e9seau d’\u00e9changes, atteignant l’Inde et l’Afrique orientale. Il connaissait la division politique (peut-\u00eatre stable) et la prosp\u00e9rit\u00e9 \u00e9conomique, les deux facteurs-cl\u00e9s du progr\u00e8s.<\/p>\n

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Pour en savoir plus<\/strong><\/p>\n

sur l’originalit\u00e9 mat\u00e9rielle et technologique de l’Europe<\/em><\/p>\n

Civilisation mat\u00e9rielle, \u00e9conomie et capitalisme, XVe-XVIIIe si\u00e8cle,<\/strong> par Fernand Braudel. Paris, Armand Colin, 1979.<\/p>\n

The European Miracle. Environments, Economies and Geopolitics in the History of Europe and Asia, <\/strong>par Eric Jones. Cambridge University Press, Cambridge, 1980.<\/p>\n

The Lever of Riches Technological Creativity and Economic Progress,<\/strong> par Jo\u00ebl Mokyr. Oxford University Press, New York and Oxford, 1990.<\/p>\n

sur la thalassographie et les math\u00e9matiques fractales<\/em><\/p>\n

Morphom\u00e9trie plane du littoral, <\/strong>par Etienne Auphan. Paris, Dinard, 1972.<\/p>\n

Classics on Fractals,<\/strong> par Edgar Gerald. Addislon-Weslex, Reading (Massachussetts, Etats-Unis), 1993.<\/p>\n

Fractals, Endlessly Repeated Geometrical Figures,<\/strong> par Hans Leuwerier. Princeton, Printeton University Press, 1991.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

Pourquoi l’Europe dominait hier… et ce qui l’attend demain Par David Cosandey David Cosandey, qui a \u00e9tudi\u00e9 \u00e0 l’Universit\u00e9 de Lausanne, est docteur en physique th\u00e9orique de l’Universit\u00e9 de Berne. Il travaille \u00e0 Zurich dans la mod\u00e9lisation math\u00e9matique financi\u00e8re. Il a publi\u00e9 en 1997, avec l’aide de la Fondation Veillon, \u2026 Lire plus \/ Read more<\/a><\/p>\n","protected":false},"author":1,"featured_media":810,"parent":809,"menu_order":0,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","template":"","meta":{"ngg_post_thumbnail":0,"footnotes":""},"class_list":["post-822","page","type-page","status-publish","has-post-thumbnail","hentry"],"_links":{"self":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/822","targetHints":{"allow":["GET"]}}],"collection":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages"}],"about":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/types\/page"}],"author":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/users\/1"}],"replies":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=%2Fwp%2Fv2%2Fcomments&post=822"}],"version-history":[{"count":1,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/822\/revisions"}],"predecessor-version":[{"id":823,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/822\/revisions\/823"}],"up":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/809"}],"wp:featuredmedia":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/media\/810"}],"wp:attachment":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=%2Fwp%2Fv2%2Fmedia&parent=822"}],"curies":[{"name":"wp","href":"https:\/\/api.w.org\/{rel}","templated":true}]}}