{"id":815,"date":"2015-01-08T22:48:28","date_gmt":"2015-01-08T21:48:28","guid":{"rendered":"http:\/\/www.archipress.org\/wp\/?page_id=815"},"modified":"2015-01-21T15:05:28","modified_gmt":"2015-01-21T14:05:28","slug":"petit-voyage-dans-les-mondes-virtuels","status":"publish","type":"page","link":"https:\/\/www.archipress.org\/?page_id=815","title":{"rendered":"Petit voyage dans les mondes \u00ab\u00a0virtuels\u00a0\u00bb"},"content":{"rendered":"

Juste pour voir !
\nPetit voyage dans les mondes \u00ab\u00a0virtuels\u00a0\u00bb<\/h3>\n

Patrick Mendelsohn<\/em> est professeur ordinaire \u00e0 la Facult\u00e9 de Psychologie et des Sciences de l’\u00c9ducation (Universit\u00e9 de Gen\u00e8ve<\/a>), o\u00f9 il dirige notamment l’Unit\u00e9 TECFA<\/a> (Technologies de Formation et Apprentissage).<\/p>\n

\n

\"Le\u00ab\u00a0Virtuel\u00a0\u00bb, vous avez dit \u00ab\u00a0virtuel\u00a0\u00bb? Ce vocable, s\u00e9same de cette fin de mill\u00e9naire, exprime \u00e0 la fois la fascination et la crainte que nous inspirent les univers impalpables, irr\u00e9els, sans limites. Tout est d\u00e9sormais virtuel: les biblioth\u00e8ques, les mus\u00e9es, les mondes, qui fleurissent sur nos \u00e9crans d’ordinateur. Si l’on s’en tient au sens litt\u00e9ral du terme, ces mondes n’existent pas vraiment. Pourtant ils sont l\u00e0, pr\u00e8s de nous, bien r\u00e9els, cach\u00e9s au d\u00e9tour d’une commande informatique anodine que vous pouvez taper en tout innocence sur le clavier de votre ordinateur.<\/p>\n

Je vous sens un brin sceptique. Vous pensez s\u00fbrement que je vais vous entretenir de jeux pour internautes noctambules. D\u00e9trompez-vous. J’aimerais seulement vous aider \u00e0 abandonner quelques id\u00e9es re\u00e7ues. Pour me suivre, acceptez de reconsid\u00e9rer le statut de certaines de vos repr\u00e9sentations famili\u00e8res. Vous entrerez ainsi de plain-pied dans le monde des m\u00e9taphores informatiques. Et, comme Alice, d\u00e9couvrirez ce qui se passe de l’autre c\u00f4t\u00e9 du miroir…<\/p>\n<\/div>\n

Mais pour att\u00e9nuer le choc, permettez-moi de commencer par vous raconter une histoire vraie, rapport\u00e9e en 1977 par l’\u00e9crivain Albert Szent-Gyorti. Alors qu’un r\u00e9giment roumain s’entra\u00eenait dans les Alpes suisses, une de ses sections, une dizaine d’hommes, entreprit un raid de survie loin de sa base. Le deuxi\u00e8me jour, la section fut surprise par la neige, le brouillard et le froid. Les responsables du r\u00e9giment, inquiets, tent\u00e8rent d’organiser des secours, mais les conditions climatiques \u00e9taient trop mauvaises. Or le troisi\u00e8me jour, la section arriva au complet, exactement selon l’horaire pr\u00e9vu. Son chef, press\u00e9 de questions, expliqua: \u00ab\u00a0Lorsque la temp\u00eate nous a surpris, nous avons vite perdu nos rep\u00e8res. Mes hommes commen\u00e7aient \u00e0 perdre courage. Mais l’un d’eux trouva alors dans son paquetage une carte topographique. Nous avons \u00e9tudi\u00e9 l’itin\u00e9raire sur la carte. C’est comme cela que nous avons pu nous tirer d’affaire.\u00a0\u00bb Le responsable demanda au chef de section de lui montrer la carte et constata, m\u00e9dus\u00e9, qu’il s’agissait d’une carte des Pyr\u00e9n\u00e9es!<\/p>\n

Que s’\u00e9tait-il donc pass\u00e9 dans la t\u00eate des \u00ab\u00a0naufrag\u00e9s des montagnes\u00a0\u00bb? Ils avaient tent\u00e9 de se rep\u00e9rer en confrontant les donn\u00e9es du terrain avec celles de la carte. Dit en termes scientifiques: \u00ab\u00a0Ils avaient trait\u00e9 les informations qu’ils percevaient pour r\u00e9soudre leur probl\u00e8me d’orientation\u00a0\u00bb. Cette activit\u00e9 leur avait permis de combattre la r\u00e9signation, de retrouver une attitude active et positive, elle les avait pouss\u00e9s \u00e0 construire une repr\u00e9sentation mentale de leur situation r\u00e9elle: ici une combe, l\u00e0 une ar\u00eate, plus loin un vallon. Les efforts consentis pour se positionner sur une carte qui n’avait, et pour cause, que de tr\u00e8s lointains rapports avec la r\u00e9alit\u00e9 dans laquelle ils se d\u00e9pla\u00e7aient, les avait finalement aider \u00e0 se tirer d’un tr\u00e8s mauvais pas.<\/p>\n

Cas limite? Histoire romanc\u00e9e? Peut \u00eatre, mais il en va de m\u00eame pour un grand nombre des repr\u00e9sentations que nous utilisons commun\u00e9ment pour r\u00e9fl\u00e9chir, imaginer et communiquer: jadis, par exemple, les contes de f\u00e9es, les r\u00e9cits historiques et les croyances de toutes sortes transmises de g\u00e9n\u00e9rations en g\u00e9n\u00e9rations; aujourd’hui, le r\u00e9seau Internet, qui n’entretient avec le r\u00e9el que des relations tr\u00e8s l\u00e2ches et peu vraisemblables dans le d\u00e9tail. Mais qu’importe car veuille Descartes me pardonner m\u00eame une repr\u00e9sentation \u00ab\u00a0fausse\u00a0\u00bb permet de raisonner juste, ou disons plut\u00f4t qu’une repr\u00e9sentation n’a pas besoin d’\u00eatre \u00ab\u00a0juste\u00a0\u00bb pour permettre d’agir en conformit\u00e9 avec le r\u00e9el!<\/p>\n

C’est \u00e0 l’illustration de cette proposition peu scientifique que je vous invite \u00e0 pr\u00e9sent. Entrez avec moi dans l’univers \u00e9tonnant des m\u00e9taphores informatiques [la m\u00e9taphore est, rappelons-le, une comparaison, une image, une repr\u00e9sentation].<\/p>\n

Pr\u00e9paration au voyage: les m\u00e9taphores.<\/strong> Les m\u00e9taphores sont comme l’alcool. Il est dangereux d’en abuser, mais consomm\u00e9es avec mod\u00e9ration, elles aident \u00e0 voir la r\u00e9alit\u00e9 en face, surtout lorsque cette r\u00e9alit\u00e9 est trop difficile pour qu’on puisse l’affronter dans sa totale complexit\u00e9. Pour comprendre comment fonctionnent les mondes informatiques \u00ab\u00a0virtuels\u00a0\u00bb, il faut d’abord imaginer les technologies du r\u00e9seau informatique comme une \u00ab\u00a0plan\u00e8te\u00a0\u00bb dont la partie visible serait ce qui se passe sur l’\u00e9cran de notre ordinateur et la partie souterraine l’univers des fichiers et du hardware.<\/p>\n

Il est important de consid\u00e9rer s\u00e9rieusement cette premi\u00e8re \u00e9tape. Les novices n\u00e9gligent trop souvent, en effet, de faire la distinction entre un fichier sur un disque dur et sa repr\u00e9sentation \u00e0 l’\u00e9cran. On peut comparer les microprocesseurs, les serveurs, les multiples connexions et les fichiers contenus dans ces \u00ab\u00a0bo\u00eetes noires\u00a0\u00bb que sont nos ordinateurs, \u00e0 autant de mines souterraines, de galeries et de lieux de stockage dont l’ordonnancement est complexe et labyrinthique. Humainement, il est impossible d’avoir une vue d’ensemble du r\u00e9seau que forme l’interconnexion des serveurs, impossible de s’imaginer ce qui se passe dans un ordinateur, car on s’y meut sans lumi\u00e8re et sans carte, sur un mode binaire pratiquement inaccessible \u00e0 notre entendement. Et pourtant \u00e7a marche!<\/p>\n

Mais, heureusement, notre \u00e9cran d’ordinateur est une fen\u00eatre qui s’ouvre sur ce monde souterrain. Sur notre \u00e9cran, les informaticiens s’ing\u00e9nient \u00e0 faire appara\u00eetre des repr\u00e9sentations m\u00e9taphoriques de plus en plus sophistiqu\u00e9es, destin\u00e9es \u00e0 rendre la manipulation des \u00ab\u00a0objets\u00a0\u00bb informatiques aussi proche que possible de nos sch\u00e9mas mentaux familiers:prendre, pointer, d\u00e9truire, copier, se d\u00e9placer<\/em>. Leur entreprise de longue haleine a donn\u00e9 naissance \u00e0 plusieurs g\u00e9n\u00e9rations de m\u00e9taphores: les fichiers, les messages, les hyperdocuments et, enfin, les \u00ab\u00a0mondes virtuels\u00a0\u00bb autant d’\u00e9tapes d’un voyage de d\u00e9couverte que je vous invite \u00e0 faire avec moi maintenant.<\/p>\n

Premi\u00e8re \u00e9tape du voyage: les fichiers dans les bo\u00eetes noires. <\/strong>La m\u00e9taphore des fichiers est la plus ancienne. C’est elle qui permet de ranger les \u00ab\u00a0objets\u00a0\u00bb informatiques les textes, les images, les programmes, etc. dans des bo\u00eetes et d’attribuer \u00e0 ces \u00ab\u00a0paquets\u00a0\u00bb d’information une \u00e9tiquette afin de les retrouver plus facilement. Il existe des bo\u00eetes sp\u00e9ciales dont la seule fonction est de contenir d’autres bo\u00eetes: les r\u00e9pertoires ou les dossiers. On peut ranger ainsi \u00e0 l’infini toutes les informations dans un vaste r\u00e9seau de r\u00e9pertoires munis d’\u00e9tiquettes portant les noms et les attributs des fichiers.<\/p>\n

La m\u00e9taphore des fichiers est tr\u00e8s utile pour mettre de l’ordre. Elle permet de retrouver un objet lorsque l’on conna\u00eet son nom, son propri\u00e9taire, sa date de fabrication. Il suffit de disposer pour cela d’un outil de recherche puissant; l’informatique traditionnelle excelle \u00e0 mettre au point ce genre d’engins.<\/p>\n

La repr\u00e9sentation en \u00ab\u00a0fichiers\u00a0\u00bb souffre cependant de plusieurs limitations. Premi\u00e8rement, il n’existe pas de lien logique v\u00e9ritable entre le nom figurant sur l’\u00e9tiquette et le contenu effectif d’une bo\u00eete, ce qui peut r\u00e9server des surprises d\u00e9sagr\u00e9ables; il suffit, pour s’en convaincre, d’essayer de chercher un fichier dans l’ordinateur d’un coll\u00e8gue en se fiant aux seuls noms figurant sur les \u00e9tiquettes… Secondement, ce mode de repr\u00e9sentation permet difficilement de mettre en valeur le contenu des bo\u00eetes: l’utilisateur qui cherche une information particuli\u00e8re dans une arborescence de fichiers est dans la position pitoyable du consommateur qui, dans un grand magasin, tente, mais en vain, de percer le secret des emballages.<\/p>\n

Avec la m\u00e9taphore des fichiers, les informaticiens proposent au fond un monde \u00ab\u00a0bureaucratique\u00a0\u00bb bien ordonn\u00e9, dont tous les citoyens appliqueraient avec docilit\u00e9 et respect les m\u00eames consignes strictes. Au d\u00e9but d’Internet cela ne faisait pas probl\u00e8me., Les internautes, peu nombreux et techniquement bien \u00e9quip\u00e9s, passaient des heures \u00e0 explorer des \u00ab\u00a0grandes surfaces\u00a0\u00bb pleines de fichiers les serveurs FTP (File Transfer Protocol<\/em>) anonymes en se laissant guider par le libell\u00e9 des \u00e9tiquettes. Ils t\u00e9l\u00e9chargeaient alors sur leur machine des quantit\u00e9s \u00e9normes d’information qu’ils tentaient ensuite de d\u00e9coder et d’analyser. Cela impliquait de leur part une grande discipline. Mais aujourd’hui, l’utilisateur moyen d’Internet d\u00e9multipli\u00e9 et d\u00e9mocratis\u00e9 n’accepte plus qu’on lui dicte son comportement.<\/p>\n

Deuxi\u00e8me \u00e9tape: les bo\u00eetes aux lettres.<\/strong> D\u00e8s que le r\u00e9seau a permis de relier entre eux tous les ordinateurs de la plan\u00e8te, les informaticiens ont profit\u00e9 de l’aubaine pour inventer le courrier \u00e9lectronique, qui permet aux individus d’\u00e9changer directement des fichiers, plut\u00f4t que de devoir les stocker sur un serveur anonyme. Le courrier \u00e9lectronique, simple transposition du mod\u00e8le du courrier classique, permet d’envoyer un message \u00e0 toute personne qui poss\u00e8de une adresse sur le r\u00e9seau. Le destinataire \u00ab\u00a0rel\u00e8ve sa bo\u00eete aux lettres virtuelle\u00a0\u00bb pour prendre connaissance des messages qui lui ont \u00e9t\u00e9 envoy\u00e9s, et r\u00e9pond par le m\u00eame moyen. Le temps de transmission des messages, tr\u00e8s rapide, ne d\u00e9pend pas de la distance. Pour peu que les correspondants lisent leur courrier fr\u00e9quemment, ils peuvent donc \u00e9changer plusieurs messages dans la m\u00eame journ\u00e9e, o\u00f9 qu’ils se trouvent dans le monde. A la diff\u00e9rence du t\u00e9l\u00e9phone, mais comme le courrier postal, le courrier \u00e9lectronique est asynchrone, c’est-\u00e0-dire que son destinataire n’a pas besoin d’\u00eatre en ligne au m\u00eame moment que ses correspondants pour recevoir leurs messages. Il est en outre possible d’attacher \u00e0 ces messages des documents textuels, visuels ou sonores, ce qui fait du courrier \u00e9lectronique le moyen le plus s\u00fbr, le plus rapide et le plus \u00e9conomique d’\u00e9changer des informations entre particuliers.<\/p>\n

L’usage du courrier \u00e9lectronique modifie les formes de la lettre classique. Les formules de politesse sont r\u00e9duites au minimum, le style devient direct et parfois familier. La rapidit\u00e9 des transmissions incite les correspondants \u00e0 \u00e9changer des questions\/r\u00e9ponses dans un style t\u00e9l\u00e9graphique proche du langage oral. Les jeunes g\u00e9n\u00e9rations se sont appropri\u00e9es ce m\u00e9dium avec enthousiasme, ce qui prouve que leur d\u00e9sir de communiquer reste intact.<\/p>\n

L’exemple du courrier \u00e9lectronique montre qu’une m\u00e9taphore bien construite a la capacit\u00e9 de s\u00e9duire rapidement de tr\u00e8s nombreux utilisateurs.<\/p>\n

Troisi\u00e8me \u00e9tape: la biblioth\u00e8que id\u00e9ale. <\/strong>Internet en ses d\u00e9buts \u00e9tait certes int\u00e9ressant, mais ne repr\u00e9sentait gu\u00e8re qu’une transposition des modes de communication standard: courrier postal, t\u00e9l\u00e9phone, fax.<\/p>\n

Les concepteurs d’Internet, gens de r\u00eave et d’exigences, se sont alors demand\u00e9 pourquoi l’on ne rendrait pas totalement transparent le contenu de toutes les \u00ab\u00a0bo\u00eetes\u00a0\u00bb du monde, qui serait ainsi \u00e0 disposition de quiconque y trouverait int\u00e9r\u00eat. Pour rendre la chose possible, ils ont donc imagin\u00e9 un \u00ab\u00a0viewer\u00a0\u00bb (un visionneur) qui affiche directement \u00e0 l’\u00e9cran le contenu des fichiers t\u00e9l\u00e9charg\u00e9s. A ce dispositif, ils ont ajout\u00e9 \u00e9galement la possibilit\u00e9 de cr\u00e9er des liens gr\u00e2ce auxquels, \u00e0 partir du document affich\u00e9, l’utilisateur peut rechercher puis afficher d’autres documents existant sur le r\u00e9seau.<\/p>\n

Ces innovations d\u00e9clench\u00e8rent aussit\u00f4t une r\u00e9action en cha\u00eene, un raz-de-mar\u00e9e, dont nul ne sait s’ils s’arr\u00eateront jamais, je veux parler du World Wide Web<\/em> (ou www, ou Web). Gr\u00e2ce \u00e0 quoi, aujourd’hui, chacun est propri\u00e9taire en puissance de toutes les informations du Web, que l’on peut consulter \u00ab\u00a0chez soi\u00a0\u00bb par l’effet d’un simple clic. Le r\u00eave des encyclop\u00e9distes est r\u00e9alis\u00e9: la biblioth\u00e8que \u00ab\u00a0id\u00e9ale\u00a0\u00bb, qui contient potentiellement tous les documents et toutes les informations de la plan\u00e8te, est d\u00e9sormais \u00e0 port\u00e9e de tous.<\/p>\n

La perc\u00e9e ph\u00e9nom\u00e9nale du Web, avec ses possibilit\u00e9s de navigation intuitives, sa biblioth\u00e8que aux dimensions plan\u00e9taires, son extraordinaire simplicit\u00e9, a ouvert l’acc\u00e8s du r\u00e9seau au grand public. Il est aujourd’hui le standard universel de la communication branch\u00e9e. Gr\u00e2ce \u00e0 lui, chaque habitant de la plan\u00e8te peut librement \u00e9diter et pr\u00e9senter au monde ses propres documents, \u00e0 un prix de revient d\u00e9risoire, et b\u00e9n\u00e9ficier de la comp\u00e9tence d’autrui au travers d’\u00e9changes citoyens.<\/p>\n

Il existe naturellement sur Internet des canaux priv\u00e9s, qui mettent \u00e0 disposition de l’utilisateur des informations de plus en plus commerciales. Mais cela ne remet pas v\u00e9ritablement en question l’esprit d’ouverture et de collaboration du Web. Je compare volontiers le r\u00e9seau mondial \u00e0 la g\u00e9ographie de nos villes: nos rues sont des espaces publics o\u00f9 nous pouvons circuler librement; que ces rues conduisent \u00e0 des espaces priv\u00e9s d’acc\u00e8s limit\u00e9, quoi de plus normal?<\/p>\n

En tout \u00e9tat de cause, gr\u00e2ce \u00e0 une toute petite m\u00e9taphore (et beaucoup de technique!) un nouvel espace \u00ab\u00a0virtuel\u00a0\u00bb de communication se d\u00e9veloppe aujourd’hui \u00e0 grande vitesse.<\/p>\n

Quatri\u00e8me \u00e9tape: les mondes \u00ab\u00a0virtuels\u00a0\u00bb.<\/strong> Si le Web est en fait une immense encyclop\u00e9die virtuelle de millions de documents physiquement dispers\u00e9s mais accessibles depuis un seul ordinateur, il ne constitue toutefois pas un \u00ab\u00a0vrai\u00a0\u00bb monde virtuel. Il n’a, en effet, aucune des caract\u00e9ristiques physiques et sociales d’un v\u00e9ritable espace. Si par exemple vous consultez une page Web du mus\u00e9e du Louvre, vous ne pouvez entrer en communication avec les gens qui, ailleurs dans le monde, regardent le m\u00eame tableau au m\u00eame moment \u00e0 la diff\u00e9rence de ce qui se passerait dans un vrai mus\u00e9e. Le site Web du Louvre fonctionne en r\u00e9alit\u00e9 comme un livre; lorsque vous passez de salle en salle, vous ne faites que tourner les pages du livre.<\/p>\n

Le Web est donc une m\u00e9taphore achev\u00e9e de la biblioth\u00e8que id\u00e9ale. Mais le probl\u00e8me est que dans la r\u00e9alit\u00e9 nous ne passons pas nos journ\u00e9es \u00e0 lire des livres. Nous avons aussi besoin d’agir sur la r\u00e9alit\u00e9, de la transformer<\/em>,<\/strong> parce que nous sommes des am\u00e9nageurs d’espaces, des b\u00e2tisseurs, des aventuriers, des cr\u00e9ateurs, et que nous aimons d\u00e9limiter, nous approprier notre territoire, d\u00e9couvrir celui d’autrui, nous retrouver dans des fronti\u00e8res, d\u00e9signer des espaces priv\u00e9s et publics, \u00e9changer de vive voix des informations… Chacun de nous aspire \u00e0 construire un micromonde \u00e0 son image, sans pour autant se couper du reste de la plan\u00e8te.<\/p>\n

Les informaticiens, port\u00e9s par ce r\u00eave, ont donc \u00e9labor\u00e9 sur nos \u00e9crans d’ordinateur des espaces ayant les m\u00eames propri\u00e9t\u00e9s sociales et visuelles que la r\u00e9alit\u00e9, o\u00f9 nous pouvons donc parler, agir et exister en tant qu’individus, o\u00f9 les objets ont une existence permanente, o\u00f9 l’action est synchronique, les lieux ont des limites, etc. Cet univers fonctionne donc comme un miroir de la r\u00e9alit\u00e9, ou presque.<\/p>\n

Mais tr\u00eave de discours. Depuis le temps que je vous parle des \u00ab\u00a0vrais\u00a0\u00bb mondes virtuels, il faut franchir le pas! Souris bien en main, entrons d’un pied ferme dans les nouveaux espaces de nos \u00e9crans.<\/p>\n

\u00c9tape ultime: le passage derri\u00e8re le miroir, petit guide pratique. <\/strong>Voici, en pratique, comme je proc\u00e8de habituellement pour entrer dans un monde virtuel. Je commence par me connecter \u00e0 un serveur sp\u00e9cialis\u00e9 (par exemple, \u00e0 l’Universit\u00e9 de Gen\u00e8ve: http:\/\/tecfa.unige.ch:7777<\/a>), puis d\u00e9cline mon identit\u00e9. Je suis en effet un habitu\u00e9, un membre. Si vous-m\u00eame ne l’\u00eates pas, ou pas encore, vous serez mon \u00ab\u00a0invit\u00e9\u00a0\u00bb. Dans l’univers qui s’affiche alors sur l’\u00e9cran, je suis repr\u00e9sent\u00e9 par mon \u00ab\u00a0avatar\u00a0\u00bb, mon personnage si vous pr\u00e9f\u00e9rez. Mon personnage r\u00e9pond aux commandes que je lui donne: il peut donc \u00ab\u00a0parler\u00a0\u00bb, \u00ab\u00a0avancer\u00a0\u00bb, \u00ab\u00a0saisir un objet\u00a0\u00bb, \u00ab\u00a0s’\u00e9mouvoir\u00a0\u00bb… Mais attention, nous ne sommes pas dans un jeu vid\u00e9o ou de simulation comme vous pourriez en trouver dans le commerce, mais dans un syst\u00e8me permanent et distribu\u00e9, accessible depuis n’importe quel ordinateur du r\u00e9seau, o\u00f9 vous aussi vous pouvez \u00ab\u00a0jouer votre propre r\u00f4le\u00a0\u00bb, comme dans la vie. C\u00f4t\u00e9 souterrain, ce monde fonctionne comme une base de donn\u00e9es \u00ab\u00a0orient\u00e9e objet\u00a0\u00bb. C’est-\u00e0-dire que, peu importe que je sois connect\u00e9 ou non, les \u00ab\u00a0objets\u00a0\u00bb de ce monde virtuel persistent, et peuvent donc \u00eatre vus et manipul\u00e9s par d’autres utilisateurs m\u00eame si je suis absent.<\/p>\n

Je puis d\u00e9cider que dans la salle virtuelle o\u00f9 je me trouve maintenant, tout le monde doit entendre ce que je vous dis, ou au contraire que je vais vous \u00ab\u00a0murmurer\u00a0\u00bb \u00e0 l’oreille un secret que personne d’autre ne devra entendre. Ainsi interpell\u00e9, vous pourrez laisser libre cours \u00e0 votre \u00e9motion, \u00ab\u00a0sourire\u00a0\u00bb si vous le souhaitez: ceux qui sont pr\u00e9sents dans la salle appr\u00e9cieront!<\/p>\n

Les membres de ce monde virtuel poss\u00e8dent l\u00e0 un bureau, qui repr\u00e9sente leur espace personnel de travail. Dans ce bureau ils disposent des meubles, des \u00e9tag\u00e8res notamment, pour ranger leurs documents, c’est-\u00e0-dire les petites bo\u00eetes \u00e9voqu\u00e9es plus haut (les fichiers) ou certaines pages www (appartenant \u00e0 la grande biblioth\u00e8que id\u00e9ale). L’avantage, ici, est que ces documents sont dispos\u00e9s dans un espace qui leur donne un sens particulier. Si je laisse tel article sur mon bureau, cela signifie s\u00fbrement que j’y travaille. Si je d\u00e9pose tel autre dans le hall d’entr\u00e9e, cela signifie que je le mets \u00e0 la disposition des visiteurs. Dans un monde virtuel, les \u00ab\u00a0objets\u00a0\u00bb tirent une grande partie de leur signification de la position qu’ils occupent dans l’espace.<\/p>\n

Ainsi puis-je d\u00e9cider de laisser une note sur mon bureau virtuel, de telle mani\u00e8re que toute personne entrant dans la pi\u00e8ce puisse la lire, \u00e0 n’importe quelle heure du jour ou de la nuit. Et si je d\u00e9place cette note, elle restera \u00e0 sa nouvelle place jusqu’\u00e0 ce que quelqu’un la prenne. Je puis aussi griffonner un message sur le tableau blanc accroch\u00e9 au mur. Et puis j’oubliais: je me suis dot\u00e9 d’un petit \u00ab\u00a0robot\u00a0\u00bb sympathique qui accueille mes visiteurs lorsque je suis absent.<\/p>\n

Les mondes virtuels proposent donc une m\u00e9taphore de l’espace physique r\u00e9el, mais avec l’avantage de me lib\u00e9rer de ses contraintes. Je puis par exemple faire communiquer mon bureau avec celui de mon coll\u00e8gue par un \u00ab\u00a0tunnel\u00a0\u00bb qui se joue des distances. Je puis repeindre les murs de mon bureau chaque jour sans d\u00e9placer mes meubles. Je puis imaginer pour mon bureau des formes architecturales nouvelles sans crainte de g\u00eaner spatialement mes voisins. Je puis doubler, voir quintupler, la surface \u00ab\u00a0virtuelle\u00a0\u00bb de mon bureau sans contrainte le prix du m\u00e8tre carr\u00e9, qui suit celui de la m\u00e9moire informatique, \u00e9tant en chute libre!<\/p>\n

Les mondes virtuels permettent aussi, sans avoir \u00e0 se d\u00e9placer, de faire de \u00ab\u00a0vraies\u00a0\u00bb rencontres avec de \u00ab\u00a0vraies\u00a0\u00bb personnes qui se trouvent en un point quelconque du globe, par la magie du voyage virtuel entre sites. Cela dit, les r\u00e8gles de politesse s’appliquent l\u00e0 comme dans la r\u00e9alit\u00e9: on frappe \u00e0 la porte, on s’annonce, on prend rendez-vous. Tout contrevenant peut se voir interdire l’acc\u00e8s d’un site.<\/p>\n

Vous \u00eates sceptique? Vous pensez que je suis un r\u00eaveur. Il faudra vous y faire, cependant: la vraie \u00ab\u00a0virtualit\u00e9\u00a0\u00bb existe. Bien s\u00fbr, elle n’est pas encore par\u00e9e de tous les effets visuels habituels au cin\u00e9ma et \u00e0 certains jeux vid\u00e9os en 3D. Pourtant, sous sa forme actuelle en deux dimensions, encore squelettique et peu spectaculaire, elle est d\u00e9j\u00e0 terriblement efficace. Certains centres de recherche l’utilisent quotidiennement dans leur travail depuis plusieurs ann\u00e9es d\u00e9j\u00e0. De grandes entreprises s’y int\u00e9ressent pour \u00e9tablir de v\u00e9ritables guichets virtuels o\u00f9 elles accueilleront et conseilleront leur client\u00e8le. Mes propres \u00e9tudiants utilisent les salles de notre campus \u00ab\u00a0virtuel\u00a0\u00bb pour r\u00e9aliser \u00e0 distance des r\u00e9unions de travail ou des exp\u00e9riences.<\/p>\n

La force des mondes \u00ab\u00a0virtuels\u00a0\u00bb? Elle tient \u00e0 leur capacit\u00e9 d’entra\u00eener des comportements sociaux, \u00e9motifs et intellectuels tout \u00e0 fait compatibles avec ceux de notre vie de tous les jours. Les mondes \u00ab\u00a0virtuels\u00a0\u00bb donnent, paradoxalement, un tr\u00e8s fort sentiment d’exister.<\/p>\n

Remarques sur ce voyage du r\u00e9el au virtuel.<\/strong> A quoi bon construire des images virtuelles du monde, me dira-t-on, si nous avons d\u00e9j\u00e0 tant de peine \u00e0 faire tourner correctement le monde r\u00e9el?<\/p>\n

C’est oublier un peu vite que le \u00ab\u00a0virtuel\u00a0\u00bb est la forme peut-\u00eatre la plus accomplie de l’imaginaire, lequel n’a pas \u00e9t\u00e9 invent\u00e9 par Internet. Les contes de f\u00e9e qui ont fa\u00e7onn\u00e9 notre imagination d’enfants, la litt\u00e9rature, le cin\u00e9ma, la t\u00e9l\u00e9vision, contiennent tous une certaine dose de \u00ab\u00a0virtuel\u00a0\u00bb. L’imaginaire soutient notre capacit\u00e9 \u00e0 inventer de nouvelles solutions aux probl\u00e8mes qui nous assaillent quotidiennement, il nous invite \u00e0 nous projeter dans l’avenir. Jean Piaget, le psychologue genevois, a construit sa th\u00e9orie de l’intelligence sur l’id\u00e9e que la pens\u00e9e r\u00e9flexive est une action \u00ab\u00a0int\u00e9rioris\u00e9e\u00a0\u00bb, une mani\u00e8re de r\u00e9aliser l’action \u00ab\u00a0virtuellement\u00a0\u00bb, c’est-\u00e0-dire sans avoir \u00e0 la mettre en oeuvre r\u00e9ellement. Juste pour voir. Cette \u00ab\u00a0r\u00e9flexion\u00a0\u00bb en miroir de nos actions fonde la pens\u00e9e humaine.<\/p>\n

Les mondes \u00ab\u00a0virtuels\u00a0\u00bb nous offrent de mani\u00e8re analogue la possibilit\u00e9 d’\u00eatre \u00ab\u00a0pr\u00e9sents\u00a0\u00bb dans un univers collectivement partag\u00e9, d’y agir, d’en modifier le cours, de le construire \u00e0 notre image. Juste pour voir. A l’instar de l’apprenti pilote qui utilise le simulateur de vol pour tester ses r\u00e9flexes dans des situations extr\u00eames, nous pourrions donc utiliser les mondes \u00ab\u00a0virtuels\u00a0\u00bb pour apprendre \u00e0 collaborer, \u00e0 r\u00e9soudre nos probl\u00e8mes communs, \u00e0 vivre la rencontre avec l’inconnu sans le mettre lui, ni nous-m\u00eames, en danger.<\/p>\n

Qu’importe si les mondes \u00ab\u00a0virtuels\u00a0\u00bb ne nous donnent qu’une vision d\u00e9form\u00e9e et approximative de la vraie r\u00e9alit\u00e9. Comme la carte pyr\u00e9n\u00e9enne qui a permis aux \u00ab\u00a0naufrag\u00e9s des Alpes\u00a0\u00bb de se tirer d’affaire, les mondes \u00ab\u00a0virtuels\u00a0\u00bb devraient nous aider \u00e0 r\u00e9agir aux dangers qui guettent notre plan\u00e8te plut\u00f4t que d’en rester les spectateurs passifs, nous aider \u00e0 retrouver les chemins de l’observation critique et de l’action partag\u00e9e .<\/p>\n

\u00a9 Le Temps strat\u00e9gique, No 82, Gen\u00e8ve, juillet-ao\u00fbt 1998.<\/p>\n

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ADDENDA<\/strong><\/p>\n

Internet avant le Web<\/strong><\/p>\n


\n<\/strong>Le r\u00e9seau Internet est n\u00e9 du projet ARPANET (ou r\u00e9seau de l’Advanced Research Projects Agency) imagin\u00e9 en 1968 aux Etats-Unis pour assurer la survie des t\u00e9l\u00e9communications militaires am\u00e9ricaines en cas de guerre. L’id\u00e9e \u00e9tait de fragmenter les messages en petits paquets, d’exp\u00e9dier ces paquets par toutes sortes de routes puis de les r\u00e9assembler \u00e0 destination pour reconstituer le message, que la destruction d’une route ne pouvait donc plus mettre en p\u00e9ril.<\/p>\n

le courrier \u00e9lectronique, informel et spontan\u00e9<\/strong>
\nDu m\u00eame coup, cependant, ARPANET rendit ais\u00e9e la transmission par paquets du simple courrier. Ce courrier \u00e9lectronique (e-mail<\/em>) connut un succ\u00e8s inattendu, ouvrant la voie \u00e0 un nouveau type de relations sociales. On peut en effet l’\u00e9crire rapidement, de mani\u00e8re informelle, sans se soucier vraiment d’\u00e9ventuelles fautes d’orthographe ou de frappe, et s’adresser ainsi \u00e0 une personne inconnue ou occupant une position hi\u00e9rarchique sup\u00e9rieure sans qu’elle ne s’offusque.<\/p>\n

Au cours des ann\u00e9es 70, une seconde technologie les r\u00e9seaux Usenet et BITNET donna aux usagers la possibilit\u00e9 de conduire des conf\u00e9rences interactives, \u00e0 mi-chemin de la communication m\u00e9diatique (unidirectionnelle, de un \u00e0 tous) et du courrier \u00e9lectronique (interactif, de point \u00e0 point).<\/p>\n

les groupes de discussion<\/strong>
\nL’utilisateur de Usenet (Unix User Network<\/em>) se connectait \u00e0 un serveur o\u00f9 \u00e9taient stock\u00e9s toutes les news<\/em> et tous les points de vue qui lui avaient \u00e9t\u00e9 envoy\u00e9s par e-mail au cours des heures, des jours et des semaines pr\u00e9c\u00e9dents. Il pouvait alors r\u00e9pondre aux commentaires des autres utilisateurs et envoyer ses commentaires propres.<\/p>\n

Le r\u00e9seau BITNET (Because It’s Time NETwork<\/em>) permettait, quant \u00e0 lui, l’envoi d’un message \u00e0 tous les abonn\u00e9s d’une liste donn\u00e9e. N’importe qui pouvait inscrire son nom sur ces listes ou l’en retirer. BITNET avait une forme plus conservatrice que Usenet, puisqu’un mod\u00e9rateur pouvait faire le tri des messages.<\/p>\n

les serveurs FTP et Gopher<\/strong>
\nAvec la croissance d’Internet, ses utilisateurs voulurent pouvoir transf\u00e9rer des fichiers informatiques d’un site \u00e0 un autre. Le d\u00e9veloppement d’un logiciel sp\u00e9cialis\u00e9, le FTP (File Transfer Protocol<\/em>), leur en donna la possibilit\u00e9. Mais aussit\u00f4t les sites FTP priv\u00e9s et publics se mirent \u00e0 prolif\u00e9rer. H\u00e9las, il fallait t\u00e9l\u00e9charger les fichiers puis les ouvrir un \u00e0 un avant de tomber (\u00e9ventuellement) sur l’information recherch\u00e9e. Pour parer \u00e0 cette difficult\u00e9, un nouveau syst\u00e8me, le Gopher, fut mis en place. Les serveurs Gopher utilisaient des menus \u00e0 choix multiples proposant des fichiers informatiques dont le contenu \u00e9tait bri\u00e8vement r\u00e9sum\u00e9.
\n
\nla r\u00e9volution du Web<\/strong>
\nJusqu’en 1989, l’interface du r\u00e9seau \u00e9tait essentiellement textuelle. Mais cette ann\u00e9e-l\u00e0,Tim Berners-Lee, inventa au CERN, \u00e0 Gen\u00e8ve, l’interface graphique World Wide Web (\u00ab\u00a0toile [d’araign\u00e9e] mondiale\u00a0\u00bb reliant entre eux tous les r\u00e9seaux d’ordinateurs) qui combinant l’acc\u00e8s aux textes, aux images et aux sons, et permettant d’y naviguer ais\u00e9ment. C’est gr\u00e2ce au Web (WWW pour les intimes) qu’Internet est d\u00e9sormais accessible au grand public.
\n
\nSource:<\/em>
The History of the Net par Henry Edward Hardy<\/a>. Design of Information Systems, University of Michigan, School of Information and Library Studies, 1993.
\n(http:\/\/www.ocean.ic.net\/ftp\/doc\/nethist.html)<\/p>\n

\n

\u00ab\u00a0Le pied de la table est au soir de sa vie\u00a0\u00bb<\/strong><\/p>\n

La m\u00e9taphore (du grec metaphora<\/em> \u00ab\u00a0transport\u00a0\u00bb) est selon Aristote (Po\u00e9tique) \u00ab\u00a0le transport \u00e0 une chose d’un nom qui en d\u00e9signe une autre\u00a0\u00bb. Cette figure rh\u00e9torique consiste \u00e0 transf\u00e9rer une signification \u00e0 partir d’une analogie ou d’une comparaison implicite \u00e9tablie entre deux mots ou r\u00e9alit\u00e9s. Dans notre langage quotidien nous usons d’une grande vari\u00e9t\u00e9 de m\u00e9taphores ( \u00ab\u00a0l’homme est un loup pour l’homme\u00a0\u00bb, \u00ab\u00a0la soci\u00e9t\u00e9 est un organisme\u00a0\u00bb, \u00ab\u00a0le soir de la vie\u00a0\u00bb…) dont certaines cessent d’\u00eatres figuratives et deviennent des descriptions litt\u00e9rales (\u00ab\u00a0le pied de la table\u00a0\u00bb). La m\u00e9taphore simplifie l’expression du langage et permet de comprendre certains concepts exprim\u00e9s par une analogie (\u00ab\u00a0la souris de votre ordinateur est une repr\u00e9sentation m\u00e9taphorique de votre index\u00a0\u00bb).<\/p>\n

L’arbre est virtuellement pr\u00e9sent dans la graine\u00a0\u00bb<\/strong><\/p>\n

Le virtuel<\/strong> (du latin virtualis <\/em>\u00ab\u00a0vertu\u00a0\u00bb qui d\u00e9rive de virtus<\/em>, \u00ab\u00a0force\u00a0\u00bb, \u00ab\u00a0puissance\u00a0\u00bb) d\u00e9signe une chose ou une r\u00e9alit\u00e9 qui n’est qu’en puissance, qui est potentiellement porteuse de sa r\u00e9alisation (\u00ab\u00a0l’arbre est virtuellement pr\u00e9sent dans la graine\u00a0\u00bb). Une chose virtuelle n’existe pas en tant que fait actuel, mais en tant qu’essence. La conception courante du virtuel est tr\u00e8s proche significativement du possible, de l’imaginaire, voire de l’irr\u00e9el et de l’illusion. Pour un psychologue, le virtuel n’est pas tant une projection ou un prolongement de la r\u00e9alit\u00e9, mais plut\u00f4t une de ses repr\u00e9sentations. Selon le philosophe Pierre L\u00e9vy, \u00ab\u00a0est virtuelle une entit\u00e9 \u00ab\u00a0d\u00e9territorialis\u00e9e\u00a0\u00bb, capable d’engendrer plusieurs manifestations concr\u00e8tes en diff\u00e9rents moments et lieux d\u00e9termin\u00e9s, sans \u00eatre pour autant elle-m\u00eame attach\u00e9e \u00e0 un endroit ou \u00e0 un temps particuliers\u00a0\u00bb.<\/p>\n

\n

Virtuel et virtuel: ne pas confondre!<\/strong><\/p>\n

Le d\u00e9veloppement du cyberespace a engendr\u00e9 deux formes de virtuel. La plus connue est la r\u00e9alit\u00e9 virtuelle<\/em> qui cherche essentiellement \u00e0 mimer le r\u00e9alisme visuel de la communication; elle a \u00e9t\u00e9 d\u00e9velopp\u00e9e surtout pour les jeux (la simulation de vol a\u00e9ronautique par exemple) puisqu’il s’agit d’immerger l’explorateur dans un paysage qui lui donne l’illusion visuelle de la r\u00e9alit\u00e9. L’autre forme de virtuel est le monde virtuel<\/em> qui, lui, mime le r\u00e9alisme social de la communication. Le monde virtuel permet \u00e0 une communaut\u00e9 d’interagir et de manipuler des objets, mais sans r\u00e9alisme visuel. Tout se fait par \u00e9crit. Un jour, la puissance des ordinateurs permettra de fusionner la r\u00e9alit\u00e9 virtuelle et le monde virtuel.<\/p>\n

Tu r\u00e9ponds quand tu peux!<\/strong><\/p>\n

Le monde virtuel d\u00e9velopp\u00e9 par les chercheurs du TECFA<\/a> (Technologies de Formation et Apprentissage) de l’Universit\u00e9 de Gen\u00e8ve est essentiellement destin\u00e9 \u00e0 la recherche et \u00e0 l’enseignement. Le professeur Mendelsohn dirige notamment des classes virtuelles qui conduisent \u00e0 un dipl\u00f4me post-grade (DES) en Sciences et Technologies de l’Apprentissage et de la Formation. Le monde virtuel permet une communication synchrone ralentie: alors que le t\u00e9l\u00e9phone interrompt nos activit\u00e9s, les participants \u00e0 un monde virtuel peuvent interagir quand ils en ont le temps. L’enseignant peut ainsi mener plusieurs t\u00e2ches en parall\u00e8le: animer par exemple sa classe virtuelle tout en supervisant les travaux de ses \u00e9tudiants.<\/p>\n

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\n

Bibliographie virtuelle<\/strong><\/p>\n

Qu’est-ce que le virtuel?<\/a><\/strong> Par Pierre L\u00e9vy. Paris, La D\u00e9couverte, 1995.<\/p>\n

Virtual Environments for Education, Research and Life,<\/a> <\/strong>par Daniel K. Schneider. TECFA, Facult\u00e9 de Psychologie et des Sciences de l’Education, Universit\u00e9 de Gen\u00e8ve.<\/p>\n

\u00ab\u00a0MUDs Grow UP: Social Virtual Reality in the Real World\u00a0\u00bb,<\/strong><\/a> par Pavel Curtis et David A. Nichols. In: Third International Conference on Cyberspace<\/em>, Austin, Texas, 1993.<\/p>\n

Cultural Formations in Text-Based Virtual Realities,<\/a><\/strong> par Elizabeth M. Reid. Th\u00e8se, Cultural Studies Program, Department of English, University of Melbourne.<\/p>\n

\u00ab\u00a0Living Inside the (Operating) System: Community in Virtual Reality\u00a0\u00bb,<\/strong> <\/a>par John Unsworth. In: Computer networking and scholarly communication in the 21st century<\/em> (Harrison, T. et T.D., S., \u00e9d.), SUNY Press, Albany, 1995.<\/p>\n

Deux centres importants d’\u00e9tudes et de formation \u00e0 distance<\/em><\/p>\n

Centre romand d’enseignement \u00e0 distance<\/a><\/strong> (CRED, Sierre)<\/p>\n

Centre national d’enseignement \u00e0 distance<\/a><\/strong> (CNED, France)<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

Juste pour voir ! Petit voyage dans les mondes \u00ab\u00a0virtuels\u00a0\u00bb Patrick Mendelsohn est professeur ordinaire \u00e0 la Facult\u00e9 de Psychologie et des Sciences de l’\u00c9ducation (Universit\u00e9 de Gen\u00e8ve), o\u00f9 il dirige notamment l’Unit\u00e9 TECFA (Technologies de Formation et Apprentissage). \u00ab\u00a0Virtuel\u00a0\u00bb, vous avez dit \u00ab\u00a0virtuel\u00a0\u00bb? Ce vocable, s\u00e9same de cette fin \u2026 Lire plus \/ Read more<\/a><\/p>\n","protected":false},"author":1,"featured_media":810,"parent":809,"menu_order":0,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","template":"","meta":{"ngg_post_thumbnail":0,"footnotes":""},"class_list":["post-815","page","type-page","status-publish","has-post-thumbnail","hentry"],"_links":{"self":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/815","targetHints":{"allow":["GET"]}}],"collection":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages"}],"about":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/types\/page"}],"author":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/users\/1"}],"replies":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=%2Fwp%2Fv2%2Fcomments&post=815"}],"version-history":[{"count":1,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/815\/revisions"}],"predecessor-version":[{"id":816,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/815\/revisions\/816"}],"up":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/809"}],"wp:featuredmedia":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/media\/810"}],"wp:attachment":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=%2Fwp%2Fv2%2Fmedia&parent=815"}],"curies":[{"name":"wp","href":"https:\/\/api.w.org\/{rel}","templated":true}]}}