{"id":467,"date":"2015-01-02T22:19:39","date_gmt":"2015-01-02T21:19:39","guid":{"rendered":"http:\/\/www.archipress.org\/wp\/?page_id=467"},"modified":"2015-01-25T23:19:43","modified_gmt":"2015-01-25T22:19:43","slug":"memoires-dun-immigre","status":"publish","type":"page","link":"https:\/\/www.archipress.org\/?page_id=467","title":{"rendered":"M\u00e9moires d’un immigr\u00e9"},"content":{"rendered":"

\"\u00a0Lectures, Le Temps, 10 novembre 2012<\/p>\n

Tobie Nathan: savant, sorcier, passeur<\/h3>\n

par R\u00e9da Benkirane<\/p>\n

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Tobie Nathan, Ethno-Roman. <\/em>Grasset, 2012.<\/p>\n

La psychanalyse de papa ramenait tout \u00e0 des d\u00e9terminations courues d\u2019avance: maman, oedipe, phallus, anus. L\u2019ethnopsychiatrie de Tobie Nathan introduit la pens\u00e9e sauvage dans la m\u00e9decine occidentale; elle renvoie au grand d\u00e9lire collectif qui agite les choses anim\u00e9es depuis la nuit des temps, \u00e0 la polyphonie des anges et des d\u00e9mons, aux feux de brousse qu\u2019embrasent des forces malignes de quelque Afrique mentale.<\/p>\n

Tobie Nathan a commenc\u00e9 \u00e0 faire parler de lui il y a un peu plus d\u2019une quinzaine d\u2019ann\u00e9es pour la discipline, l\u2019ethnopsychiatrie, qu\u2019il a pour l\u2019essentiel invent\u00e9e dans les couloirs d\u2019h\u00f4pitaux fran\u00e7ais. Au contact de migrants n\u00e9vros\u00e9s issus de cultures extra-europ\u00e9ennes, il \u00e9labore une th\u00e9rapeutique m\u00e9tisse de la maladie mentale, au croisement de la psychoth\u00e9rapie et de l\u2019ethnologie. Approcher le trouble mental selonl\u2019arri\u00e8re-planculturel du patient, recourir \u00e0 des techniques traditionnelles de transe et de soin, interpr\u00e9ter ses r\u00eaves, faire parler les esprits qui l\u2019agitent, travailler avec des traducteurs d\u2019idiomes africains et avec des gu\u00e9risseurs, telle est la d\u00e9marche d\u00e9complex\u00e9e de ce psychoth\u00e9rapeute.<\/p>\n

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Dans ses M\u00e9moires o\u00f9 r\u00e9sonnent de multiples voix, l\u2019auteur retrace son parcours, de sa quasi mystique \u00absortie d\u2019Egypte\u00bb en 1956 suite \u00e0 la crise de Suez jusqu\u2019\u00e0 sa rencontre d\u00e9cisive avec son mentor, l\u2019anthropologue Georges Devereux.<\/p>\n

C\u2019est l\u2019histoire d\u2019un \u00e9migr\u00e9, juif levantin,un jeune banlieusard des ann\u00e9es 1960. Form\u00e9 dans le chaudron social de mai68, il aura su \u00e9chapper aux impasses existentielles de l\u2019id\u00e9ologie et de la drogue, en poursuivant une qu\u00eate du savoir, un amour des femmes et de la litt\u00e9rature, une formation \u00e0 la psychanalyse. Son \u00abint\u00e9gration\u00bb \u00e0 la soci\u00e9t\u00e9 fran\u00e7aise passe par l\u2019\u00e9cole et l\u2019universit\u00e9, maisn\u2019a jamais signifi\u00e9 de renoncer \u00e0 la m\u00e9moire du pass\u00e9 ant\u00e9rieur ni de renier les cultures dont sa famille h\u00e9rite depuis des g\u00e9n\u00e9rations: jud\u00e9it\u00e9, arabit\u00e9, francit\u00e9, africanit\u00e9\u2026
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\nEthno-Roman<\/em> raconte aussi le processus qui am\u00e8ne le disciple \u00e0 se lib\u00e9rer du Ma\u00eetre et de ses pulsions \u00e9gotistes pour poursuivre son propre chemin vers \u00ablesAutres\u00bb.<\/p>\n

La psychanalyse de papa ramenait tout \u00e0 des d\u00e9terminations courues d\u2019avance: maman, oedipe, phallus, anus. L\u2019ethnopsychiatrie de Tobie Nathan introduit la pens\u00e9e sauvage dans la m\u00e9decine occidentale; elle renvoie au grand d\u00e9lire collectif qui agite les choses anim\u00e9es depuis la nuit des temps, \u00e0 la polyphonie des anges et des d\u00e9mons, aux feux de brousse qu\u2019embrasent des forces malignes de quelque Afrique mentale.<\/p>\n

Gitan de la science, m\u00e9t\u00e8que, juif aimant Dieu mais aussi ses divinit\u00e9s connexes,Tobie Nathan traduit les mythes bibliques et les fait dialoguer avec les contes orientaux ou africains. La religion n\u2019est pas seulement affaire de croyance mais aussi de cr\u00e9ance. Se confier, s\u2019en remettre aux esprits, parlementer avec les morts, percevoir les mondes invisibles, c\u2019est acc\u00e9der \u00e0 l\u2019id\u00e9alisation de la r\u00e9alit\u00e9 qui fa\u00e7onne des paysages mentaux.<\/p>\n

Le passeur clandestin de savoirs pars\u00e8me son autobiographie de retours d\u2019exp\u00e9rience: des s\u00e9ances de gu\u00e9rison loin du regard de l\u2019Occident ponctuent une d\u00e9monstration tout en pointill\u00e9s sur d\u2019autres modes de rationalit\u00e9. Les histoires de vie de Tobie Nathan rappellent que chaque migrant confin\u00e9 \u00e0 la banlieue, rejet\u00e9 par consensus ou par sondage d\u2019opinion, sous-estim\u00e9, sous-aim\u00e9 est potentiellement un medecine man<\/em>, untrickster<\/em>, un diplomate, un artisan des relations interculturelles et un intercesseur aupr\u00e8s des dieux mineurs et des malins g\u00e9nies. L\u2019auteur est m\u00fb par une intuition fondamentale: la pens\u00e9e est une production collective.<\/p>\n

R\u00e9da Benkirane<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

\u00a0Lectures, Le Temps, 10 novembre 2012 Tobie Nathan: savant, sorcier, passeur par R\u00e9da Benkirane Tobie Nathan, Ethno-Roman. Grasset, 2012. La psychanalyse de papa ramenait tout \u00e0 des d\u00e9terminations courues d\u2019avance: maman, oedipe, phallus, anus. L\u2019ethnopsychiatrie de Tobie Nathan introduit la pens\u00e9e sauvage dans la m\u00e9decine occidentale; elle renvoie au grand \u2026 Lire plus \/ Read more<\/a><\/p>\n","protected":false},"author":1,"featured_media":1783,"parent":0,"menu_order":0,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","template":"","meta":{"ngg_post_thumbnail":0,"footnotes":""},"class_list":["post-467","page","type-page","status-publish","has-post-thumbnail","hentry"],"_links":{"self":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/467","targetHints":{"allow":["GET"]}}],"collection":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages"}],"about":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/types\/page"}],"author":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/users\/1"}],"replies":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=%2Fwp%2Fv2%2Fcomments&post=467"}],"version-history":[{"count":7,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/467\/revisions"}],"predecessor-version":[{"id":1784,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/pages\/467\/revisions\/1784"}],"wp:featuredmedia":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=\/wp\/v2\/media\/1783"}],"wp:attachment":[{"href":"https:\/\/www.archipress.org\/index.php?rest_route=%2Fwp%2Fv2%2Fmedia&parent=467"}],"curies":[{"name":"wp","href":"https:\/\/api.w.org\/{rel}","templated":true}]}}